Samedi après-midi à Antony, dans une salle municipale à côté du marché, se tenait une réunion à l’initiative d’associations aussi diverses que variées du territoire Vallée Sud. La pluie et le froid, la nuit qui tombe vite, n’avaient pas dissuadé une cinquantaine de personnes de participer à une réflexion collective en liaison avec la consultation publique sur le Plan Climat Air Energie Territorial (PCAET). L’article de Gérard Bardier hier a situé le contexte et les parties prenantes. Il reprenait à sa manière ce que fut l’introduction à l’après-midi. On n’y reviendra pas.
L’organisatrice en était la CATTE, Coordination des Associations du Territoire pour la Transition Ecologique, impliquée dès le début dans les ateliers participatifs organisés par les élus des onze villes du territoire.
Comme son nom l’indique, la CATTE n’est pas pour l’heure d’une association, mais une coordination. Une quarantaine d’associations y contribuent, dont les objets varient de la promotion du vélo à la défense des trames vertes, du végétarisme à des projets pratiques d’amélioration des performances thermiques des bâtiments, en passant par des AMAP ou des Repair café. C’est dire l’éventail de sensibilités qui s’y expriment.
Avant d’en passer à ce que lesdites sensibilités de la CATTE pensent du PCAET, rappelons à ceux à qui cela aurait échappé les objectifs que VSGP lui assigne :
- La réduction de 40%des émissions de gaz à effets de serre en 2030
- 100% de déchets valorisés d’ici 2030
- 100% des logements rénovés énergétiquement d’ici 2050
- La réduction de 45% des déchets sur le territoire d’ici 2050
- 15% de déplacement à vélo d’ici 2050
source : https://www.valleesud.fr/fr/PCAET
L’heure est à l’action
La réunion d’Antony visait les communes de la partie sud du Territoire, une autre étant prévue pour le nord. Elle a commencé par une présentation générale du contexte suivie d’une présentation du travail que la CATTE a mené sur le PCAET dans sa phase projet. L’assistance a été ensuite divisée en quatre groupes repartis en quatre tables, chacune étant dotée de post-its de couleur (une couleur par thème) pour exprimer des propositions. Ces « ateliers », lieux de discussion, ont permis à la CATTE de collecter et partager de nouvelles idées. Les posts-its affichés rassemblés par thème sur un mur ont fait l’objet d’une synthèse au pied levé par les animateurs de la rencontre. Pas évident. Enfin, un vibrant appel à participer à la consultation publique.
Ces thèmes de réflexion sont ceux-là mêmes que la CATTE avait utilisés pour le PCAET, à savoir (sans notion d’importance dans l’ordre d’apparition) : l’alimentation, les bâtiments, la consommation, la nature en ville, l’énergie, les mobilités. Résumons les idées que la CATTE avait portées auprès de VSGP et faisons-les suivre par les contributions issues de la rencontre de samedi.
Commençons par le premier.
Alimentation
Les contributions de la CATTE au projet de PCAET avaient exprimé des exigences de deux repas par semaine sans viande et sans poisson dans la restauration collective. Plus menu végétarien en option tous les jours. L’argument en est que les produits animaux représentent 70% de l’empreinte carbone de l’alimentation. S’y ajoute la lutte contre le gaspillage alimentaire. La seconde demande était la création d’un label pour les « restaurants durables » qui proposent des plats végétariens, des produits de saisons, bio, en circuits courts….).
En séance, se sont ajoutées l’éducation des enfants aux menus végétariens, la mutualisation des cuisines centrales (à préciser sans doute, car cela existe déjà) et des flux logistiques (probablement par des achats groupés).
Bâtiments
L’engagement de rénover 6000 logements par an, affiché dans le projet de PCAET, avait soulevé un doute profond. Ce nombre de 6000 est certes nécessaire pour atteindre les objectifs d’isolation des habitations. Est-il pour autant réaliste ? Les entreprises sont-elles en mesure de réaliser les travaux ? Les habitants ont-ils connaissance des coûts (aide au financement incluse) ? Rien n’est moins sûr. C’est pourquoi un projet phare de 1000 logements était proposé avec un accompagnement financier attractif et une forte sensibilisation du grand public aux avantages de la sobriété.
D’autres demandes avaient été formulées, dont un effort de rénovation du parc tertiaire privé, et plus généralement le choix de la rénovation plutôt que de la démolition.
Les « ateliers » ont proposé de mieux responsabiliser les entrepreneurs à l’aide de contrats performance-énergie, ainsi que d’utiliser des matériaux biosourcés. L’impact de ce type de norme serait à identifier.
Consommation
La consommation est comprise dans un cycle global incluant la production, l’acheminement, les déchets et l’économie circulaire. Elle situe la consommation des biens à 20% de l’empreinte carbone totale.
La CATTE avait promu l’économie circulaire et de recyclage des matériaux du BTP (Bagneux semble-t-il prévoit un écopole à cet effet). Elle avait aussi insisté sur la sensibilisation des citoyens sur la part des déchets dans les émissions de CO2.
Lors du résumé des contributions de l’atelier, la logique des 5R est rappelée :
> Refuser ce dont nous n’avons pas besoin comme les tickets de caisse, les prospectus, la publicité.
Source : https://villages78entransition.fr/la-regle-des-5-r-a-suivre-dans-lordre-pour-reduire-ses-dechets/
> Réduire les gaspillages alimentaires, les emballages jetables et préférer acheter en vrac, réparer, troquer, donner.
> Réutiliser ce que nous consommons et qui peut avoir une seconde vie : sacs en tissus, contenants en verre,…
> Recycler ce que nous ne pouvons ni refuser, ni réduire, ni réutiliser : le verre, le papier, le carton, le métal.
> Rendre à la terre les déchets organiques : aliments, bois, cartons non souillés, feuilles, herbe.
Des composteurs dans les immeubles sont proposés. De même qu’un accroissement des locaux destinés à la réparation. Un couplage avec la Chambre des métiers est évoqué.
Nature en ville
Ce thème rassemble les partisans de la biodiversité en zone urbaine. Ils proposent de refabriquer des domaines verts de plusieurs hectares pour que des espèces de la faune puissent s’y ébattre et s’y reproduire. Pour les constructions neuves, l’idée est qu’elles soient au cœur d’îlots arborés et de pleine terre. De plus, était demandée une cartographie de la végétation et des réseaux écologiques (je n’en ai pas capté le sens) lesquels souffrent d’un déficit de comptage dû au fait, apprend-on, que les jardins et les parcs d’immeubles en sont ignorés.
En séance, des demandes de friches inaccessibles, seules à même de protéger les bêtes, ont été émises. Encore convient-il de leur donner un espace suffisant et donc de relier les friches les unes aux autres. Il n’est pas certain que la faisabilité ait été abordée. Je passe à un autre point : réduire l’imperméabilisation des sols, tant sur les espaces publics que dans les espaces privés..
Energie
Tout cruciaux qu’ils soient, les enjeux en matière d’énergie ne s’en résument pas moins aisément. La CATTE avait envoyé des messages simples : réduire drastiquement la part fossile (elle est de 65% actuellement) ; par conséquent, développer les autres sources et promouvoir l’électricité ; inciter à la sobriété, lutter contre le gaspillage. Elle rappelle l’importance de l’information, à la fois en direction des citoyens (sur les passoires thermiques notamment) et vers les communes sur l’évolution de la législation.
Les propositions de la salle poursuivent les demandes d’aide à la rénovation des bâtiments. Elles insistent sur la communication nécessaire auprès des particuliers sur les fins annoncées concernant le fioul et les moteurs thermiques. Elles appellent aussi au développement de la géothermie et des énergies vertes. Elles ajoutent cependant des actions sur les éclairages publics.
Mobilités
La contribution au PCAET avait suivi quatre directions. Le soutien aux mobilités autres que la voiture ; la réduction des déplacements contraints ; l’amélioration des transports publics ; le développement des transports scolaires, y compris à vélo.
Sur le multimodal (partage entre les types de transports), la volonté était d’avancer sur les départementales 906, 986 et 920, de même que sur les gares qui ont vocation à faciliter les passages d’un mode à un mode. Il y avait également la volonté d’étudier de nouveaux usages de la ligne Orlyval qui sera concurrencée par le tram.
Les propositions faites en « atelier » ont relevé parfois de l’amont avec le souhait de voir se rapprocher l’emploi, parfois du fonctionnement : amélioration de la sécurité pour les femmes dans les transports publics, de meilleures amplitudes du RER et des bus. Bien sûr, le vélo a fait l’objet d’attentions : aménagements des voiries, infrastructures de stationnement. Et puis, cerise sur le gâteau, espoir de prolongement du métro (ligne 4) jusqu’à Robinson.
Des éclaireurs ?
Ces dialogues d’après-midi gris à Antony témoignaient d’une envie : celle de se réunir pour s’entretenir des affaires collectives. Relevons que cela reste inhabituel et qu’il y a de l’espérance.
En même temps, on sentait une sorte de « Y’a qu’à en faire plus, faut qu’on soit plus ambitieux », assez facile à exiger des politiques. Surtout si l’on ne s’inquiète pas trop de l’acceptabilité sociale. Il ne s’agit pas de refuser l’exercice, mais de se demander comment prendre en compte, dans une certaine part, les forces qui s’opposent aux demandes. Les meilleures intentions ont leurs objecteurs, le vélo irrite les automobilistes (les piétons aussi), l’économie circulaire inquiète les artisans côté réparation et les ouvriers côté fabrication. On en reste à ces deux exemples, car l’essentiel est de reconnaître tout l’intérêt de s’assembler pour proposer à condition d’anticiper les contestations dans leur mise en application.
A retenir aussi de cet après-midi : l’investissement personnel de ses animateurs. Ils se sont dépensés dans son organisation et sa conduite. Ça se respecte ; mieux, ça s’estime. A retenir encore l’assistance : tout honorable qu’en fut le nombre, elle était acquise ; elle se reconnaissait qui dans le végétarisme, qui dans le vélo ou la forêt urbaine. On n’était pas dans le questionnement du quidam. C’est le sort du « participatif ». Il entrecroise en général la force de ses propositions et l’imaginaire d’une avant-garde.
Les réseaux écologiques portent aussi, dans les documents de planification territoriale, le nom de trame verte et bleue. L’idée (et la réalité écologique) que ce terme décrit est que les continuités augmentent la valeur des surfaces préservées. En d’autres termes si on a 100 ha d’espaces naturels sur un territoire, il vaut mieux qu’ils soient constitués de taches reliées les unes aux autres que de tâches isolées les unes des autres. Les parties valent moins que le tout.
Je pique au passage : « En même temps, on sentait une sorte de « Y’a qu’à en faire plus, faut qu’on soit plus ambitieux », assez facile à exiger des politiques. »
Ce sentiment irait-il jusqu’à traduire l’espérance de l’arrivée d’une autorité politique… « autoritaire » ?
Il est vrai que les ambitions de VSGP traduites dans les objectifs de son PCAET mériteraient peut-être d’y recourir pour atteindre les résultats espérés.