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La population mondiale augmente encore

Tous les ans, les médias alertent : le jour du dépassement a été atteint. Alors que l’année n’est pas terminée, l’humanité a déjà consommé ce que la planète peut fournir en ressources renouvelables sur l’ensemble d’une année. Ce jour du dépassement arrive de plus en plus tôt, en 2022, c’était le 28 juillet.

Comment en est-on arrivé là ? Par la conjonction de deux phénomènes. D’abord l’augmentation des ressources consommées par habitant (conséquence du progrès technique et de la croissance économique). Ensuite en raison de l’augmentation considérable de la population mondiale.

Au début du néolithique, il y avait moins de 10 millions d’humains. Nous étions environ 200 millions aux alentours de l’an 400, 500 millions vers l’an 1500, un milliard vers 1800, le double vers 1930 et environ 8 milliards aujourd’hui. Entre 1950 et 1990, la croissance de la population a été particulièrement rapide, avec un doublement en 40 ans. La population mondiale augmente actuellement d’environ 80 millions de personnes par an. Qu’en sera-t-il en 2050, en 2100 ?

La croissance rapide observée depuis 70 ans a une conséquence sur les effectifs de chaque génération : les personnes âgées(d’où est issue une part importante des décès) sont nettement moins nombreuses par génération que celles en âge de procréer(d’où sont issues les naissances). D’où l’augmentation annuelle d’environ 80 millions par an. Pour estimer ce qui va se passer dans 30 ou 80 ans, ce n’est pas cette valeur mais le taux de fécondité (le nombre d’enfants que chaque femme a en moyenne) qu’il faut observer.

Spontanément, on se dit que si chaque femme a en moyenne deux enfants, la population devrait être stable. Mais ce n’est vrai que si toutes les filles qui naissent atteignent l’âge de féconder. Si la mortalité infantile est telle que la moitié des filles meurent avant 15 ans, il faudra que chaque femme ait en moyenne 4 enfants pour que la population soit stable. En fonction de la proportion de filles qui atteignent l’âge adulte, on peut donc définir le taux de fécondité nécessaire pour stabiliser la population. Jusque vers 1800 (et l’invention du vaccin contre la variole), ce taux de fécondité nécessaire pour stabiliser (appelé seuil de remplacement des générations) était élevé, supérieur à 4 enfants par femme. Le taux de fécondité réellement observé était légèrement supérieur, ce qui faisait que la population mondiale augmentait, mais que cette augmentation était assez lente : par exemple 700 ans pour un doublement entre l’an 1000 et l’an 1700.

Avec les progrès de la médecine (les vaccins et la pénicilline notamment) la mortalité infantile s’effondre. Le seuil de remplacement passe en dessous de 3, et même de 2,5. Dans un premier temps le taux de fécondité réel reste supérieur à 5 enfants par femme, ce qui conduit à une augmentation rapide de la population. Puis les femmes diminuent le nombre de leurs enfants : c’est ce qu’on appelle la transition démographique.  Quand on a fait ce constat, on a imaginé que les familles ajusteraient leur nombre d’enfants pour une stabilisation de la population. Ce n’est pas ce que l’on constate aujourd’hui : dans les pays qui ont fait leur transition démographique (en Europe par exemple) le taux de fécondité observé est inférieur (parfois de beaucoup) au seuil de remplacement.

Une dernière remarque avant de regarder les graphiques : le seuil de remplacement est un peu supérieur à deux. D’abord parce qu’il naît un peu plus de garçons que de filles (1,04 G pour 1 F). Ensuite parce que la mortalité infantile n’a pas complètement disparu. Ce seuil de remplacement apparaît par une ligne horizontale verte sur les graphiques.

Le graphique ci-dessous concerne l’ensemble de la population mondiale.

Le nombre d’enfants par femme est encore très élevé dans les années 1950 à 1970, ce qui explique l’augmentation très rapide de la population à cette époque. Puis on observe, entre 1970 et 2000 une baisse rapide : le nombre d’enfants par femme est presque divisé par deux. En 2000, les démographes sont assez optimistes. Mais, jusque vers 2015, la baisse est au contraire faible ; le taux de fécondité augmente d’ailleurs dans certaines régions (Europe et Maghreb par exemple).  Depuis 5 ans, on observe une nouvelle baisse. Le plus surprenant est que le mouvement est général dans le monde, même si la baisse des naissances en Chine ces dernières années contribue de manière importante à la baisse générale de la fécondité. En tous les cas, toutes les régions (continents, et leurs sous-ensembles) voient actuellement leur fécondité baisser.

Il est évidemment très difficile de savoir dans quelle mesure cette baisse va se poursuivre dans les prochaines années, d’où les différentes hypothèses de projection.

On peut tirer quelques enseignements de ce qu’on vient de regarder :

  • D’abord noter que la population va continuer à augmenter dans les prochaines années
  • Ensuite on peut s’attendre à un pic (le moment où le nombre de décès sera égal à celui des naissances dans quelques décennies), à un niveau qu’on peut estimer aujourd’hui très probablement inférieur à 10 milliards
  • Ce pic devrait être suivi par une baisse, lente au début, mais qui pourrait s’accélérer ensuite (après plusieurs décennies)

Concrètement, d’ici 2100, l’évolution de la population mondiale ne sera pas la principale variable explicative de l’évolution de la consommation des ressources : le taux de croissance du PIB mondial par habitant est nettement plus élevé que le taux de croissance (en baisse) de la population. La part de l’industrie et celle des services, les modalités de collecte et de recyclage des déchets sont des facteurs plus importants.

On peut noter au passage que la fécondité est actuellement inférieure au seuil de remplacement dans tous les pays d’Europe. Au point pour certains de poser à termes de gros problèmes de maintien de de l’État providence (voir par exemple la pyramides des âges de l’Italie)

Mais l’augmentation, même faible, de la population mondiale ne rend pas réaliste l’idée de passer à des modèles agricoles moins productifs (par exemple, l’agriculture bio donne des rendements en moyenne deux fois plus faibles que l’agriculture intensive). Le Sri Lanka vient d’ailleurs d’en faire douloureusement l’expérience.

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