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Bêtisier #6 : faisons comme les Suédois !

Les adversaires du confinement font souvent référence à la Suède qui aurait eu de bons résultats contre le Covid sans recours à des mesures autoritaires, et ne connaitrait pas de deuxième vague parce qu’elle a fait confiance à l’immunité collective. La réalité est assez éloignée de cette description idyllique !

Les mesures prises en Suède

La Suède a effectivement eu une manière particulière de lutter contre l’épidémie Covid-19, dans sa manière de conjuguer des mesures contraignantes et des recommandations

Pendant la première phase (mars /juin), les mesures contraignantes ont consisté à

  • Interdire les visites dans les maisons de retraite le 31 mars
  • Fermer les bars et nightclubs qui ne permettaient pas une distanciation sociale suffisante
  • Fermer les lycées et facultés
  • Interdire les rassemblements de plus de 50 personnes

Les recommandations ont porté sur

  • Le travail à domicile pour les travailleurs des villes à forte densité de population (Stockholm)
  • La limitation des contacts sociaux

Face à une récente deuxième phase, la Suède a pris une mesure plus contraignante qu’en première phase, interdisant depuis le 16 novembre les rassemblements de plus de 8 personnes et renouvelant l’interdiction de visite dans les maisons de retraite.

Il est également recommandé (pour trois régions, Stockholm, Västra Götaland et Östergötland), d’éviter de se trouver dans des environnements intérieurs (centres commerciaux, gymnases, mais les courses sont autorisées), d’aller à des réunions (concerts, afterworks, spectacles, pratique du sport [ne s’applique pas aux enfants nés après 2005]).

En outre, le travail à domicile est à nouveau recommandé fortement.

Les résultats obtenus

Lors de la première vague, la Suède a eu un peu plus de décès par habitants que la France. Elle en eu également beaucoup plus que ses voisins scandinaves : environ 5 fois plus qu’au Danemark, 10 fois plus qu’en Norvège ou en Finlande. L’une des particularités de cette première vague en Suède, par rapport à d’autres pays européens, est que la décroissance de la vague a été beaucoup plus lente. Comme partout, les mesures prises pour réduire les contacts ont fait passer le taux de reproduction en dessous de 1. En France, il s’est situé autour de 0,7/0,75. Le nombre de contaminations (et à leur suite d’hospitalisations et de décès) a donc été divisé par 2 toutes les deux semaines, ce qui l’a mené assez bas dès le mois de mai.  En Suède, avec un taux de reproduction plus élevé (0,85/0,9 ?), on a une division par deux tous les mois, les résultats très bas obtenus en France vers la mi-mai ne se produisant que vers juillet. Le taux de mortalité par millions d’habitants, qui était plus faible en Suède jusqu’en juin, a ensuite dépassé celui de la France.

L’une des conséquences de la lenteur de la décroissance est que l’économie suédoise a été fortement touchée, plus que celle de la France, et plus que celle des pays voisins.

La deuxième vague a commencé à être visible dans le courant du mois d’octobre. Elle est encore dans une phase ascendante (ce que ne montrent pas les derniers chiffres car il y a des délais assez long de déclaration des décès en Suède, la vue des graphiques peut être trompeuse). Il est trop tôt pour en tirer des comparaisons. Les autres pays scandinaves connaissent également une deuxième vague, également plus faible qu’en Suède.

Discussion

Quelle évaluation peut-on faire de la méthode choisie par les Suédois ?

Première remarque : elle n’a pas permis de faire mieux que les pays européens les plus touchés par l’épidémie (Belgique, Angleterre, Italie, France et Espagne).

Au-delà de cette remarque, les conclusions sont plus fragiles, tant chaque pays a son histoire. Il suffit de regarder l’importance qu’a eu le rassemblement de Mulhouse en février pour la France, ou de comparer la situation en Ile de France et en Bretagne.

On peut cependant signaler que la Suède avait a priori deux caractéristiques qui conduisent à s’étonner qu’elle ait eu une mortalité si élevée

  • Ses voisins (Norvège, Danemark et Finlande) ont eu une mortalité beaucoup plus basse qu’elle (quand la France est entourée de pays qui ont été très touchés)
  • Elle a une faible densité de population : presque aussi grande que la France, mais avec 6 fois moins d’habitants. La capitale fait moins d’un million d’habitants sur un territoire double de celui de Paris. Or, l’épidémie a touché en priorité les grandes villes très denses et connectées au monde entier : New York, Londres, Paris ou la Lombardie. On comprend que dans les villes très denses, chacun a plus de contacts que dans des zones très peu peuplées (que ce soit la Creuse ou le Nord de la Suède)

Par ailleurs, toutes les enquêtes montrent depuis des décennies que les Suédois ont plus confiance en leur gouvernement que les Français, et suivent mieux les consignes (ce qui ne veut pas dire qu’ils les suivent tous !). Qui pense vraiment qu’il suffisait de recommander aux Français d’appliquer plus strictement les gestes barrières pour qu’ils le fassent ? Après tout, les discours d’alertes répétés n’ont pas empêché un taux de reproduction supérieur à 1 pendant tout l’été !

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