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Les surprises de la simulation carbone

HUMEUR J’ai essayé de comprendre les évaluations de l’empreinte carbone. Plusieurs sites Internet proposent une liste de questions simples relatives aux actes et comportements quotidiens que chacun d’entre nous peut avoir.

Comparaison faite, les différents « calculateurs » proposent peu ou prou les mêmes items, car il y a maintenant une référence : https://www.gouvernement.fr/actualite/calculez-votre-empreinte-carbone.

Hypothèses

J’ai été interpellé par une hypothèse de départ qui semble avoir été faite par les créateurs/diffuseurs de ces questionnaires : le « modèle » auquel se réfèrent ces questions est celui d’un citoyen aisé, consommateur directement ou indirectement d’énergies fossiles à l’origine du dégagement de CO2 (chauffage de l’habitation, transports – avion, train, voiture, vélo, à pied…, habitudes alimentaires, services publics et… numériques !). Ceci étant, apparaît quand même le souci de permettre aux plus modestes d’y trouver leur place.

J’ai donc essayé de me mettre dans la peau d’un déshérité, du genre de ceux qui mobilisent nombre d’associations caritatives et dont les médias alimentent leurs chroniques quand il fait trop froid ou trop chaud. Un grand merci au passage à l’abbé Pierre et ses dignes successeurs ainsi qu’à Coluche et à tous les bénévoles qui contribuent avec générosité à faire fonctionner les Restos du cœur.

Le « déshérité » répond au questionnaire

Alors, donc, j’ai répondu au questionnaire proposé par le « calculateur » en imaginant la consommation d’un pauvre hère à temps complet. Déplacements en voiture, en avion, en train, en bus, en ferry, en camping-car ? Évidemment aucun. Le déshérité n’a que ses pieds.

Là où ça se complique, c’est sur la nourriture. Peut-on affirmer que le pauvre hère est végétalien ou a un choix alimentaire affirmé. Il mange ce qu’il trouve. Un jour, rue Houdan, une femme qui mendiait demandait un sandwich et non de l’argent. Elle s’est vue proposer un jambon beurre. Que croyez-vous qu’elle fit : elle le mangea, bien sûr.

Les principes sont parfois des luxes. De même pour les produits locaux ou de saison ou le café. Comment savoir ? D’ailleurs on peut répondre « je ne sais pas ».

Du soda, zéro ; vin ou bière, zéro (même si ce n’est pas très réaliste), de même pour le zéro déchet.

Suivent des questions sur la conso électrique, le type de logement, la climatisation, le chauffage, etc. auxquelles je réponds zéro, pour être cohérent avec l’hypothèse. Idem, pas d’achat de t-shirt ou de pantalon ni de short. Pas d’appareil numérique. Aucune pratique culturelle. Nib. Vous voyez que le questionnaire va loin dans l’investigation et, encore, je ne liste pas tout.

Pas de sport, pas de meubles, le bonhomme vit sous les ponts. La pudeur oblige à ne pas mentionner la réponse à la question sur les produits d’hygiène consommés. Mais ce n’est quand même pas zéro et du coup, on se prend de l’empreinte carbone dans les dents.

Une perspective qui interroge

Je suis arrivé à une empreinte de 3,5 tonnes de CO2 par an. Peut mieux faire et de beaucoup. Une recherche rapide sur Internet, avec les mots-clés « empreinte carbone minimum », propose en premier choix la phrase suivante : « Les experts estiment qu’il faudrait limiter ce chiffre à 2 tonnes de CO2 par an pour réussir à atteindre la neutralité carbone et à limiter le réchauffement de la planète. »

Et voilà ! Même en vivant comme un déshérité, il me faudrait faire un gros effort pour tendre vers les 2 tonnes.

Mais je ne serais pas le seul. Le calculateur attribue la consommation de la façon suivante :

  • Services sociétaux : 1,6 tonne (services publics, services marchands)
  • Alimentation : 1,4 tonne (repas, boisson, déchets)
  • Logement : 0,5 tonne
  • Divers : 0,1 tonne
  • Transport : 0 tonne

On apprend ainsi que les services publics ont à montrer l’exemple. Et que, même en menant une vie de privations, le poids de l’alimentation compte presque autant.

Une lueur d’espoir. Les paramètres bougent. Car, cela n’a échappé à personne, les citoyens qui dirigent notre monde ne sont pas idiots et travaillent comme des fous pour trouver des énergies substituables aux fossiles et de préférence renouvelables. J’ai nommé la fée électricité. Selon certains experts, dont Jean-Marc Jancovici auteur avec Christophe Blain d’un formidable succès d’édition avec leur bande dessinée Le monde de la fin, la partie n’est pas gagnée d’avance, mais on peut toujours espérer.

… ou pourrait interroger

Sur ce, le numéro de décembre 2023 de Sceaux Mag édité par la ville fait la place belle à l’annonce de toutes les festivités qui nous sont proposées en ce mois de Noël. L’éditorial de Philippe Laurent, qui ouvre ce numéro comme les autres, rend hommage à la qualité de vie de notre ville et à la vitalité de ses commerces. Il ne manque pas de resituer cette satisfaction dans le cadre des réalités de notre monde avec tous ses « préoccupants soubresauts » … sans oublier de « porter attention à celles et ceux… qui peuvent être dans la difficulté ».

L’image de notre ville en sort contrastée, riche et bourgeoise, sans états d’âme.

De quoi désespérer, si l’on suit la manière dont on mesure l’empreinte carbone et les objectifs à atteindre. Le modèle vertueux est celui du pauvre ou plutôt de l’archipauvre. Quel écart avec la façon dont Philippe Laurent gère sa ville comme il l’a toujours fait, très bien. Il a le souci des habitants, de la culture ; il soutient le commerce. Mais alors, on irait dans le mur, tout en se disant que tout va très bien.

Ne serait-ce pas se bercer d’illusions ?

Car, pendant ce temps, se tient la COP 28. Les dernières nouvelles semblent indiquer que ces calculs d’empreinte carbone deviennent sans objet devant l’obstination des décideurs étatiques de continuer à nous faire vivre avec des énergies fossiles.

Faudra-t-il que nous envisagions d’y arriver contraints et forcés… plus tard ?

  1. Jean-Claude Herrenschmidt Jean-Claude Herrenschmidt 3 février 2024

    @Jean-françois Lévy.
    Je lis sous votre plume du 23 janvier l’assertion suivante :
    …Par ailleurs, « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » : il n’y a pas de « création » de CO2. …
    Confirmez-vous ?
    Je comprends bien qu’il n’y ait pas de création de carbone, ni d’oxygène.
    Mais, dans ma compréhension des choses et lors de la combustion des hydrocarbures, il y a bien création de molécules de CO2 qui se retrouvent dans l’atmosphère.
    Ai-je bien compris ?

  2. François Lévy François Lévy 23 janvier 2024

    La COP 28 aurait consacré la relance du nucléaire ?

    Il me semble que c’est une vision un peu déformée, voire borgne ?

    La France a eu un mal fou à trouver une petite vingtaine de pays pour essayer de soutenir le nucléaire et « appeler » à le tripler

    C’est sûr, on peut compter sur le Maroc et le Ghana pour essayer d’enrayer le déclin du nucléaire…

    Bizarre, les projections les plus optimistes de l’AIEA sont nettement plus basses ?

    « Selon l’hypothèse haute des nouvelles prévisions, la capacité nucléaire installée devrait plus que doubler d’ici 2050, pour atteindre 890 gigawatts électriques (GWe), contre 369 GWe aujourd’hui. Selon l’hypothèse basse, cette capacité devrait atteindre 458 GWe »

    Bizarre encore, le développement faramineux du nucléaire n’arrive même pas à compenser les réacteurs qui ferment ?
    Et pour l’instant, ça baisse loin du rêve de tripler !

    Bizarre, les USA autorisent de garder les réacteurs 80 ans, mais les industriels ferment 23 réacteurs en AVANCE, plusieurs années avant d’y être obligés, à cause de leur coût exorbitant (c’est vrai que c’est privé là bas, alors que chez nous, c’est nos impôts…)

    Et même si l’hypothèse haute de l’AIEA se réalisait, comme la production d’électricité mondiale devrait elle aussi doubler d’ici 2050, la part du nucléaire stagnerait vers 10%.

    Si c’est l’hypothèse basse, elle tomberait à 5% de l’électricité mondiale.

    Si on regarde avec l’autre œil, on pourrait peut-être aussi dire que la cop28 a consacré le développement des renouvelables ?

    110 pays s’engagent cette fois ci. 5 fois plus que pour le nucléaire !

    Tripler les ENR d’ici 2030, soit en 6 ans, au lieu de (peut être) doubler le nucléaire d’ici 2050 soit en 26 ans.

    Et là, c’est quasiment certain vu les engagements déjà pris et l’accélération énorme de 2023 (+50% ENR/2022)

    https://www.iea.org/news/massive-expansion-of-renewable-power-opens-door-to-achieving-global-tripling-goal-set-at-cop28?utm_campaign=IEA+newsletters&utm_medium=Email&utm_source=SendGrid

    L’AIE table sur 90% de renouvelables d’ici 2050.

    On en reparle au prochain accident nucléaire majeur ?

    En espérant que ce ne soit pas Zapporijia ni chez nous…

  3. François Lévy François Lévy 23 janvier 2024

    Je n’ai pas dit « qu’il faut arrêter le nucléaire parce que sa part diminue », c’est plutôt l’inverse.

    C’est parce que 80% des investissements mondiaux dans l’énergie sont dans les renouvelables et quasiment plus rien dans le nucléaire que la part du nucléaire s’écroule à 1,8% de l’énergie mondiale. C’est ce que dit l’AIE : « Renewables are set to contribute 80% of new power capacity to 2030 »

    Sauf chez nous. Cherchez l’erreur ?

    Ça baisse tous les ans (divisé par 2 depuis 30 ans !) même en Chine qui pourtant concentre la moitié des projets nucléaires du monde car Ils développent encore plus massivement les EnR : en 2023 ils ont atteint leurs objectifs ENR de 2030. 7 ans D’AVANCE ! Quand Macron repousse à 2050 nos objectifs éoliens de 2030 (soit une division par 3!).

    Même la France a baissé (involontairement) plus le nucléaire que l’Allemagne : -129 TWh/an depuis 2010 alors que l’Allemagne n’a baissé que de 100 TWh sur la même période.

    Rappel : investir 10 milliards dans 1 EPR n’entraînera aucune réduction de CO2 avant minimum 15 ans (si EDF respecte les délais…), et au contraire les augmentera à cause de la construction.

    Investir 10 milliards dans les renouvelables entraînera une forte réduction des GES quasi immédiate, sans déchets éternels ingérables ni risque d’accident majeur.

    L’ONU nous exhorte à avancer la neutralité carbone en 2040.

    On n’a PLUS le TEMPS d’attendre 1 hypothétique EPR pour 2040-45.

  4. YAG YAG 18 janvier 2024

    A François Lévy: je vous confirme que RTE ne sait pas compter.
    Aujourd’hui il y a environ 10 000 éoliennes en France et l’éolien représente moins de 10% de l’énergie consommée.
    Donc il est assez évident que 30 000 éoliennes ne suffiront pas pour atteindre le 100% renouvelable.
    Il est d’ailleurs très intéressant d’étudier comment RTE a manipulé ses scénarios (désolé, je ne trouve pas d’autres mots) pour s’y retrouver dans ses calculs. Je donne un indice : c’est en rapport avec le début de l’article ci-dessus de JEAN-CLAUDE HERRENSCHMIDT.

    • François Lévy François Lévy 19 janvier 2024

      Je vous laisse la responsabilité quasi complotiste de votre affirmation « RTE aurait manipulé les scénarios »

      Les éoliennes déjà installées font 1 à 2 MW et celles qu’on installe aujourd’hui font 6 à 8 MW

      RTE chiffre à 60GW le besoin du parc éolien terrestre, soit 10 000 éoliennes de 6 MW ou 30 000 de 2 MW.

      Par ailleurs, si le rapport RTE manque d’objectivité, c’est plutôt parce qu’il prend des hypothèses très favorables au nucléaire.

      C’est ce qu’a écrit la cour des comptes en obligeant RTE par référé à refaire les calculs avec des hypothèses plus réalistes et en intégrant le coût des déchets (construire un nouveau parc d’EPR impose de construire aussi un 2e centre de stockage tel cigeo et de retraitement tel la hague :

      en prenant 3% au lieu des 7% qu’EDF a difficilement obtenu à Hinkley Point, RTE affiche un cout de 67 €/MWh au lieu de 106 € à Hinkley Point (coût qui a explosé depuis).

      La cour demande donc à RTE de refaire rapidement (en 2022) les calculs avec des taux d’actualisation DIFFÉRENTS en fonction des risques de chaque filière (risques opérationnels très élevés pour le nucléaire, élevés pour l’éolien offshore alors qu’ils sont inexistants pour le solaire PV). NB: C’est ce qu’avait fait l’ADEME (qui elle trouve que le 100% renouvelables est 39 milliards moins cher)

      Recommandation n° 2 : (DGEC, RTE, 2022) Calculer le coût complet de chaque scénario de mix électrique, en ayant recours à des variantes de coûts et de taux d’actualisation, en fonction des risques associés au développement de chaque filière de production.

      Par ailleurs, la cour demande également à RTE d’intégrer dans ses calculs les coûts de gestion des déchets :
      Recommandation n° 3 : (DGEC, RTE, 2022) Prévoir et expliciter, pour les scénarios de mix électrique comprenant une hypothèse de renouvellement du parc nucléaire, la prise en compte des investissements associés à l’aval du cycle du combustible.

      https://www.ccomptes.fr/fr/publications/lanalyse-des-couts-du-systeme-electrique-en-france

      Par ailleurs, voici ce qu’écrit A. Grandjean (polytechnicien, fondateur de carbone 4 avec Jancovici) :

      « Le facteur de charge de l’éolien terrestre retenu par RTE est de 23% ce qui est faible[50]. Le biogaz est très peu utilisé pour l’électricité (12 TWh[51]) et à un coût élevé[52]. RTE suppose ensuite que les centrales thermiques fonctionnent à partir d’hydrogène produit sur le territoire français, à un coût de 3,6 euros le kg soit 130 €/MWh alors que les études disponibles (IEA, Irena, Deloitte, Agora) convergent sur une estimation proche de 2 euros le kg incluant le coût de stockage et de transport.

      Enfin, les capex retenus pour les centrales à gaz à cycle combiné (CCGT) sont élevés (900 euros le kW) alors que la Commission européenne retient plutôt un niveau de 650 €/kW[53].

      Notons aussi que les coûts de flexibilité totaux (de l’offre) sont dépendants de la demande finale d’électricité : plus elle est faible moins il y en a besoin. Ils sont aussi dépendants de la flexibilité de la demande : plus les ménages peuvent déplacer leurs consommations facilement, pour la recharge de leur véhicules électriques, pour le chauffage et les produits blancs, moins il y a besoin de flexibilité de l’offre.

      Sans entrer ici dans une analyse beaucoup plus fine, il apparait donc que, dans son scénario de référence, RTE a eu la main un peu lourde en défaveur des scénarios sans nucléaire. Malgré cela, les écarts entre les différents scénarios sont limités (de l’ordre de 25 % ce qui est assez clairement à l’intérieur de la fourchette d’incertitude des évaluations faites) surtout si on élimine les scénarios N2 et N03 peu réalistes comme on l’a vu. »

      https://alaingrandjean.fr/2022/01/10/lecons-tirees-travaux-recents-de-prospective-energetique/

      • Gérard Bardier Gérard Bardier 20 janvier 2024

        On va répéter cette conclusion de RTE car il semble que ce soit difficile à entrer
        Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables impliquent des paris technologiques lourds
        Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables impliquent des paris technologiques lourds
        Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables impliquent des paris technologiques lourds
        Je rappelle
        Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables impliquent des paris technologiques lourds

        • François Lévy François Lévy 20 janvier 2024

          Merci, mais tu devrais la citer en entier :

          11) Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables, ou celui nécessitant la prolongation des réacteurs nucléaires existants au-delà de 60 ans [c’est-à-dire le scénario N3], impliquent des paris technologiques lourds pour être au rendez-vous de la neutralité carbone en 2050 ;

          Pourquoi avoir tronqué la partie de la phrase de RTE concernant le nucléaire ?

          https://www.rte-france.com/analyses-tendances-et-prospectives/bilan-previsionnel-2050-futurs-energetiques

          L’ASN est même encore plus critique sur le scénario N3, celui avec le maximum de nucléaire possible (selon EDF elle-même: 50% nucléaire, 50% ENR):

          Prolongation des réacteurs : « Ce scénario risque d’engager le système électrique dans une impasse », avertit l’ASN
          Scénario pourtant choisi par Macron…

          https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/nucleaire-le-defi-de-la-prolongation-des-reacteurs-au-dela-de-60-ans-235394

          Par ailleurs, RTE a justement annoncé il y a quelques mois qu’un des « paris technologiques lourds » venait d’être gagné (avec l’utilisation de machines tournantes pour stabiliser un réseau à forte part de renouvelables)

          Les renouvelables sont depuis 2 ans la 1ère source d’électricité en Europe et devraient devenir la 1ère source d’électricité au monde d’ici la fin de l’année, ou l’année prochaine, d’après l’AIE.

          Le nucléaire continue son déclin à 9,2% de l’électricité mondiale, soit 1,8% de l’énergie finale mondiale, part divisée par 2 depuis 1996 (17,4%).

          La messe est dite

          • Jean-Claude Herrenschmidt Jean-Claude Herrenschmidt 22 janvier 2024

            Faut-il n’y lire que du second degré ?
            Devant un tel déluge de références dans lequel je me noie facilement, je suis obligé, pour surnager, de reprendre les choses point pas point.
            Maintenant qu’on est bien d’accord sur une des origines de la présence de CO2 dans l’atmosphère, en écrivant cela, je pense à la combustion des énergies fossiles, serez-vous d’accord François Levy pour reconnaître que l’accroissement rapide de son taux ces 150 dernières années a pour cause l’activité humaine ?

          • Gérard Bardier Gérard Bardier 23 janvier 2024

            Merci de ce rappel. Il souligne que les paris technologiques sur une très grande part de renouvelables sont aussi importants que ceux sur le prolongement des réacteurs nucléaires au-delà de 60 ans.
            Je crois que tous les anti nucléaires qui trouvent que le prolongement au-delà de 40 ans est déraisonnable comprendront l’importance de la comparaison.
            Mais si la comparaison vaut pour l’importance du pari, elle ne vaut pas pour la faisabilité des scénarios. Pour la bonne raison qu’un seul des trois scénarios de relance du nucléaire inclut la prolongation des réacteurs au-delà de 60 ans. RTE présente ainsi ce scénario :
            Le scénario N03 est structuré autour de la trajectoire haute de construction de nouveaux réacteurs. Il repose sur la mise en service de 14 EPR et sur le développement d’autres types de réacteurs tels que les petits réacteurs modulaires (SMR), permettant d’atteindre 27 GW de nouveau nucléaire. En parallèle, la fermeture des réacteurs existants est repoussée au maximum en prolongeant quelques réacteurs au-delà de 60 ans d’exploitation.
            Ce qui signifie que la décision d’aller vers ce scénario, plutôt que sur l’un des deux autres, pourra être prise dans une quinzaine d’années. Ce qui donne du temps pour que des études approfondies (et l’exemple de ce qui se passe aux U.S.A.) éclairent la décision
            Il n‘en est pas de même pour le choix d’un scénario « tout renouvelables » qui suppose un arrêt immédiat de toute nouvelle construction nucléaire.
            L’ASN ne dit pas autre chose : son rôle sera de valider, ou non, le prolongement le moment venu, sur la base d’études sérieuses, comme elle le fait déjà pour le prolongement au-delà de 40 ans.
            En cherchant ces informations, j’ai pu en trouver quelques autres, que je me fais un plaisir de partager ici.
            D’abord sur le site de RTE. RTE a fait varier ses scénarios selon le taux d’actualisation. Et observe :
            Le coût du capital a un impact important sur le coût complet des scénarios mais influe plus faiblement sur l’écart de coûts des scénarios, sauf dans une configuration où le coût du capital diffère entre les filières.
            Que signifie concrètement un taux d’actualisation de 7%, utilisé ici ? Que le futur vaut moins que le présent. Avec 7%, ce qui se passe dans 11ans vaut deux fois moins que ce qui se passe aujourd’hui, dans 22 ans 4 fois moins et dans 33 ans 8 fois moins. Une conception particulièrement incohérente avec les discours sur l’avenir de la planète ou le développement « durable ».
            J’ai aussi cherché ce qu’on disait sur la stabilisation des systèmes électrique. Je n’ai trouvé qu’’un seul article sur le sujet , à propos de la Guadeloupe https://www.revolution-energetique.com/le-compensateur-synchrone-cette-etrange-machine-qui-stabilise-les-reseaux-electriques-isoles/
            On peut y lire :
            Selon RTE et l’AIE, la question de l’« efficacité de compensateurs synchrones à stabiliser un système électrique à grande échelle reste quant à elle à évaluer ».
            On notera au passage que cette régularisation a évidemment un coût qui viendra s’ajouter à ceux de la gestion de l’intermittence et ceux du développement des réseaux pour les solutions à forte part de renouvelables (Rien que les réseaux, le programme de développement de renouvelables allemand a déjà coûté plus de 100 milliards d’€ et il n’est pas fini).
            Quelques mots sur l’étrange argument selon lequel il faudrait abandonner le nucléaire parce que sa part diminue. La part de la géothermie est relativement marginale dans le monde. Faut-il l’abandonner pour autant ? Va-t-on dire à l’Islande qu’elle ferait mieux d’implanter des éoliennes (je ne crois pas que les panneaux solaires soient une solution géniale dans ce cas) ?
            Par ailleurs, mettre en avant le recul de la part du nucléaire est il pertinent juste après une COP 28 qui a consacré sa relance :
            https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/12/14/cop28-la-filiere-du-nucleaire-savoure-une-reconnaissance-mondiale_6205805_3244.html
            Parmi les pays qui veulent développer leur nucléaire, on note pour commencer les deux pays les plus peuplés de la planète, l’Inde et la Chine (35% de la population mondiale à eux deux). Une très bonne chose, car leur production électrique s’appuie énormément sur le charbon, ce qui en fait les premiers émetteurs de GES.
            Plus surprenant, la présence du Japon et de l’Ukraine, les pays de Fukushima et de Tchernobyl. Peut-être ont-ils un regard mieux informé sur le sujet que nos écolos français ou européens ?
            Ayant découvert le site « révolution énergétique », j’y ai remarqué aussi quelques articles sur le développement mondial du nucléaire
            https://www.revolution-energetique.com/dossiers/voici-la-carte-des-centrales-nucleaires-en-construction-dans-le-monde/
            Pour finir et pour parler des éoliennes, signalons ce discours du président du conseil de surveillance de Siemens Energy, Joe Kaeser, qui parle de la transition verte comme d’un « conte de fées ». Il évoque la flambée des prix de production des éoliennes, qui a contribué à la perte de 4,5 milliards de sa filiale spécialisée. Il a aussi noté que « la volonté de construire des turbines de plus en plus grandes s’est dans certains cas révélée contre-productive »
            https://twitter.com/DocuVerite/status/1749165230830039364

          • François Lévy François Lévy 23 janvier 2024

            A Jean Claude Herrenschmidt

            Il y a un consensus scientifique unanime sur l’origine humaine du réchauffement climatique depuis les années 1970.

            Les pétroliers ont financé des pseudo scientifiques pour instiller le doute là où il n’y en avait pas, comme cela a été fait pour le tabac, l’amiante, les pesticides, etc… Ils ont discrédité les scientifiques qui alertaient, en allant jusqu’à payer des journalistes pour s’acharner médiatiquement sur eux (ce que certains ont publiquement reconnu).

            Tout le monde se rappelle les affirmations bidon de Claude Allègre, géologue, auto proclamé expert en climatologie, dont la responsabilité dans notre inaction est majeure.

            Par ailleurs, « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » : il n’y a pas de « création » de CO2.

            La combustion des énergies fossiles par les activités humaines entraîne l’augmentation de la concentration en CO2 dans l’atmosphère, qui est passée de 300 ppm en 1960 à 413 ppm aujourd’hui, avec les effets (sécheresses, inondations, tempêtes, incendies, canicules…) qu’on commence à subir.

            Le Giec nous implore de réduire drastiquement nos émissions d’ici 2040 pour espérer garder un monde vivable pour nos enfants.

            C’est pas avec 1 EPR peut-être pour 2040-43 qu’on y arrivera.

  5. Jean-Claude Herrenschmidt Jean-Claude Herrenschmidt 10 janvier 2024

    Merci pour cette longue démonstration.
    Je veux bien reconnaître que la référence à Jean-Marc Jancovici pourrait être ici une erreur puisque l’objet de mon humeur était, au premier chef, le calculateur d’empreinte carbone, le CO2 étant identifié à un GES contributif au réchauffement climatique.

    Pour rester sur le discours de Jean-Marc Jancovici, une seule question : l’analyse de sa BD, truffée de mensonges, conduit-elle à nier définitivement l’hypothèse de la contribution des énergies fossiles (charbon, gaz et pétrole) à la création de gaz carbonique ?

    • François Lévy François Lévy 19 janvier 2024

      Je n’ai jamais entendu quiconque nier cette hypothèse de base de la chimie ?

      Même les pires climatoseptiques n’ont jamais dit une telle absurdité ?

      Où avez-vous lu ça ??

      • Gérard Bardier Gérard Bardier 20 janvier 2024

        Quand François Lévy ne comprend pas le second degré…

        • François Lévy François Lévy 23 janvier 2024

          A Jean Claude Herrenschmidt

          Il y a un consensus scientifique unanime sur l’origine humaine du réchauffement climatique depuis les années 1970.

          Les pétroliers ont financé des pseudo scientifiques pour instiller le doute là où il n’y en avait pas, comme cela a été fait pour le tabac, l’amiante, les pesticides, etc… Ils ont discrédité les scientifiques qui alertaient, en allant jusqu’à payer des journalistes pour s’acharner médiatiquement sur eux (ce que certains ont publiquement reconnu).

          Tout le monde se rappelle les affirmations bidon de Claude Allègre, géologue, auto proclamé expert en climatologie, dont la responsabilité dans notre inaction est majeure.

          Par ailleurs, « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » : il n’y a pas de « création » de CO2.

          La combustion des énergies fossiles par les activités humaines entraîne l’augmentation de la concentration en CO2 dans l’atmosphère, qui est passée de 300 ppm en 1960 à 413 ppm aujourd’hui, avec les effets (sécheresses, inondations, tempêtes, incendies…) qu’on commence à subir.

          Le Giec nous implore de réduire drastiquement nos émissions d’ici 2040 pour espérer garder un monde vivable pour nos enfants.

          C’est pas avec 1 EPR peut-être pour 2040-43 qu’on y arrivera.

  6. François Lévy François Lévy 20 décembre 2023

    La formidable bd de Jancovici est truffée de mensonges.

    Il faudrait 500 000 éoliennes d’après lui pour le 100% renouvelables ? Une tous les km ?

    Bizarre, RTE, dans ses scénarios 100% renouvelables chiffre à 30 000 éoliennes, soit moins d’une par commune ? Rte ne sait pas compter ?

    Et RTE a fait ses calculs avec des éoliennes de 2,5 MW. Aujourd’hui, on installe des 16GW en offshore et des 6 à 8 GW sur terre, c’est donc environ 3 fois moins en réalité.

    Autre exemple : Pas assez de matière pour les ENR d’après Janco?

    Bizarre, l’AIE montre que c’est faux : le principal problème de matière c’est pour les véhicules électriques, pas les renouvelables !

    Il utilise des chiffres antediluviens sur les ENR d’il y a 20 ou 30 ans et fait des règles de 3 pour arriver à dire que les ENR ne sont pas la solution.

    Bizarre les ENR se développent massivement partout dans le monde ? Il n’ont pas lu sa BD ?

    Autre exemple, il compare ENR et nucléaire en énergie primaire, ce qui multiplie par 3 les chiffres du nucléaire, puisque les 2/3 sont perdus en chaleur…

    Pourquoi tant de mensonges ?

    Ils sont tous décortiqués par Stéphane His dans « Analyse critique page à page de la bande dessinée « Le monde sans fin ». Il s’appuie sur des sources officielles et les cite. A lire.

    https://www.stephanehis.com/post/analyse-critique-page-%C3%A0-page-de-la-bande-dessin%C3%A9e-le-monde-sans-fin

    Par ailleurs, dire que « même en vivant très pauvrement, on émet trop de carbone » fait le jeu des negationistes climatiques : ça dissuade d’agir

    La réalité est que les émissions baissent dans tous les secteurs sauf l’agriculture, qui refuse de changer de modèle, ce qui devient un vrai problème.

    Les services publics, c’était 2t il y a quelques années, maintenant c’est 1,6t

    Au contraire, ceux qui ont les moyens peuvent changer de voiture (émissions divisées par 4 avec une électrique), changer de chaudière pour une PAC ou chaudière à pellets, isoler leur maison et décider de manger moins de viande ou d’acheter de la viande de qualité, AOC produite à l’herbe de façon traditionnelle sans soja OGM importé d’Amérique. Elle a une empreinte carbone beaucoup plus faible (liée à la prairie qui est un puit de carbone) et en plus, elle est nettement meilleure !

    Un ménage du 10e decile a une empreinte carbone de 33t contre 14,5t pour un ménage du 1er decile.

    • François Lévy François Lévy 21 décembre 2023

      * Aujourd’hui, on installe des 16MW en offshore et des 6 à 8 MW sur terre

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