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Garder raison sur la fermeture des lits d’hôpitaux

Sur les réseaux sociaux, on peut régulièrement lire que les problèmes d’hospitalisation avec le Covid ont été aggravés « parce qu’on a fermé des lits depuis des années ». Cela n’a en réalité pas grand-chose à voir, mais c’est l’occasion d’aborder cette question.

Des effectifs en hausse constante

Les gens l’ignorent souvent, mais les effectifs de la fonction publique hospitalière sont en augmentation constante comme le montre le graphique ci-dessous :

Ceux qui s’indignent de la fermeture de lits ici ou là oublient que des lits sont ouverts ailleurs dans la même période

Alors, pourquoi fermer des lits ?

A partir des années 60, quand la tuberculose a reculé grâce au vaccin, on a fermé, réduit ou transformé les sanatoriums du plateau d’Hauteville. En 1973, le nombre de blessés sur la route a été de 388 363. En 2020, il n’a plus été que de 55 836. Forcément, les besoins hospitaliers correspondants ont fortement diminué et les hôpitaux spécialisés de la région de Berck ont été fermés, réduits ou réorientés. L’hôpital maritime de Berck, qui dépend de l’APHP, a ainsi une unité de 60 lits pour personnes en obésité morbide, un problème inexistant il y a 50 ans.

Mais bien entendu, la disparition d’une situation ancienne n’explique pas à elle seule la réduction du nombre de lits d’une spécialité donnée. Face à l’évolution rapide de la demande globale, alors que leurs moyens n’augmentaient pas au même rythme, les établissements hospitaliers ont cherché à réduire la durée de séjour pour une intervention donnée. En 40 ans, la durée moyenne pour un accouchement a été divisée par deux. Le mouvement n’est pas nouveau : en 1995, une étude dans un établissement de province montrait une durée moyenne de séjour divisée par deux en 20 ans. Le mouvement a continué depuis avec le développement de l’hospitalisation partielle et de ce qu’on nomme l’hospitalisation à domicile, comme le montre ce graphique, issu d’une étude de la DREES[1] :

MCO : médecine, chirurgie et obstétrique. Nombre de séjours pour l’hospitalisation complète et nombre de journées pour l’hospitalisation partielle

Le développement de l’hospitalisation s’est accompagné d’un maintien global de l’hospitalisation complète, pour répondre à de nouveaux besoins, notamment liés à l’augmentation de l’espérance de vie.

Cette évolution a notamment été permise par les progrès techniques, en particulier ce qu’on appelle les méthodes non invasives. Celles qui permettent par exemple de poser un sten sur une aorte près du cœur en partant d’une légère incision au bras !

A la fin, ce type de mouvements s’accompagne, à un niveau national, de fermetures des services dont l’activité n’augmente pas (par exemple le nombre d’accouchements) au profit de ceux dont l’activité augmente plus vite que la moyenne.

Et on ne parle même pas ici des villes, départements ou régions qui voient leur population diminuer alors qu’elle augmente rapidement dans d’autres.

Les fermetures temporaires

Toujours sur les réseaux sociaux, il s’est trouvé des intervenants pour se scandaliser qu’on ferme des services hospitaliers l’été. Peut-être trouvent-ils scandaleux qu’on puisse accorder des congés au personnel médical ou soignant. Une partie importante de l’activité hospitalière est programmable. La programmation est donc faite de manière à permettre au personnel de prendre ses congés. Ce qui pose quelques problèmes d’organisation : comment transférer du personnel entre l’activité programmable et celle qui ne peut pas l’être !

Et demain ?

Il n’y a aucune raison que le mouvement de fermetures de lits s’arrête. Il reflète la capacité du système hospitalier à s’adapter aux évolutions démographiques, sociales, techniques. Et c’est tant mieux, car des moyens laissés sur des besoins devenus obsolètes sont autant de moyens en moins pour le reste du système.


[1] La DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) dépend du ministère des Solidarités et de la Santé.

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