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Enseigner la liberté d’expression ?

Une réaction à un article d’Yvon Quiniou récemment publié dans Marianne, « Pourquoi la critique des religions est essentielle (et libère les hommes) ». Le philosophe y donne sa vision de la loi de 1905 :  la liberté religieuse s’adresse aux personnes et aux lieux de culte et elle doit pleinement défendue dans la mesure où elle « ne porte pas atteinte aux lois du vivre-ensemble. ». Il n’y a, pour lui, aucune contradiction avec la critique des « croyances religieuses » qu’il considère comme une nécessité émancipatrice. « Elle vise à libérer les hommes des préjugés, des dogmes et des pratiques qui les empêchent d’être pleinement eux-mêmes… » On ne saurait mieux faire profession d’athéisme, lequel se tient tout autant que le religieux.

C’est donc une distinction que fait l’auteur entre l’attitude sociale vis-à-vis de la croyance personnelle et celle vis-à-vis de la croyance « théorique », ce qu’il appelle « la religion objective ». La liberté de critiquer cet aspect de la religion fait partie de la libre pensée philosophique du monde occidental depuis le siècle des Lumières. Des philosophes continuent d’y travailler et il ne saurait être question de la remettre en cause.

Or, comme le rappelle Yvon Quiniou, la loi de 1905 « ne dit rien sur la manière dont on a le droit, ou pas, de critiquer les religions, et donc sur le respect qu’elles méritent. » Et c’est là qu’un gros problème surgit.

Limites de la critique

La critique peut s’exprimer à différents degrés, par la moquerie, par l’ironie en passant par les sarcasmes, les caricatures, l’outrage et atteindre le blasphème, au niveau supérieur.

Ces différents niveaux de critique relèvent tous de la liberté d’expression, mais pour répondre à quel objectif ?

Est-il efficace et utile d’instruire les enfants en leur présentant des caricatures et en leur donnant cet exemple de la liberté d’expression ? 

Le phénomène des humoristes est devenu incontournable dans notre société qui valorise les comportements de masse. Faire rire de tout et de rien est devenu un métier, peu importe la portée de ce qui est dit et qui généralement contribue à dévaloriser la cible visée en dehors de toute analyse politique ou religieuse sérieuse.

L’émancipation des enfants, futurs adultes, futurs citoyens ne passe par des critiques radicales, même si elles sont pertinentes sur le plan philosophique. 

La formation à l’esprit critique et libre passe par une formation qui tient compte des croyances actuelles et en particulier de la culture familiale, qui reste encore et malgré tout le fondement de la personnalité des enfants.

Pour une pédagogie qui distingue l’obscurantisme de religion

Ne nous trompons pas de combat. Il s’agit de vaincre l’obscurantisme qui n’est pas le fait d’une religion mais d’un certain cléricalisme ou qui se présente comme tel qui utilise la religion comme vecteur de contamination …à des fins politiques. On conviendra que les religions deviennent ce que les pouvoirs temporels des hommes en ont fait. Ce que le Pape François a désigné à juste titre par le mot « cléricalisme » bien souvent bien éloigné des valeurs d’origine de la religion.

Pour Yvon Quiniou, l’espoir est au « …retour à une véritable laïcité qui implique le droit à la critique renouvelée des religions dans ce qu’elles ont d’irrationnel et de déraisonnable – la foi subjective n’étant pas impliquée ici. » Frontière bien difficile à définir…

Pour être acceptable, supportable et compréhensible par chaque citoyen, quelque soit sa culture, l’enseignement de la liberté d’expression doit être incluse dans le cadre de tous les domaines d’enseignements de l’école publique et de l’enseignement supérieur, du plus jeune âge à l’âge adulte. Et ce n’est pas dans le domaine scientifique que c’est le plus difficile à expliquer. Chaque domaine d’enseignement peut trouver le support adapté et une occasion pour cette pédagogie, afin d’en faire une démarche cohérente et noble de l’Education nationale et non une critique radicale qui restera forcément incomprise et refusée.

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