Jean-Claude Herrenschmidt publia il y a quelque temps une histoire qui racontait le parti qu’on peut tirer d’une bonté crédule. Un faux étranger a besoin d’aide. Un horodateur est nécessaire. La carte bleue aussi. Ciel ! elle disparaît (la prestidigitation est une qualité qu’on trouve souvent dans la flibuste), le faux égaré a capté le code. Jean-Claude croit que sa carte a été avalée. On se quitte bons amis et quelques minutes plus tard il y a déjà eu des retraits. Si vous en voulez plus, allez directement à l’original.
En la relisant, cette mésaventure m’a fait penser qu’il y a des situations où on vous prend votre argent, cool, tranquille, en tout bien tout honneur. Rien à dire, c’est impeccable. Air France par exemple. Ils ont (ils avaient du moins, car, depuis, je ne voyage plus vraiment avec eux) une offre de billet aller-retour. Il m’est arrivé une fois de manquer l’aller et de vouloir prendre le retour. La force était réellement majeure, fauteuil roulant à l’appui. A l’embarquement, on me refuse pour m’envoyer au bureau commercial. Audit bureau, mes explications de force majeure n’impressionnent guère. On a le sens des affaires. Je n’ai pas pris l’aller, donc c’est 125 euros de plus pour le retour. C’est légal, ça doit être écrit quelque part.
Vous allez penser que j’ai bénéficié d’un rabais inouï et qu’Air France se sacrifiait du genre « moins cher, j’peux pas, j’y perds ! Je mets la clé sous la porte ! » Mais c’était le même qu’un billet standard, sans sacrifice aucun, chez Easyjet, son concurrent. Vous me direz : pourquoi prendre cet avion ? Autant abandonner le billet et monter à Paris autrement. Certes, mais la même force majeure m’obligeait à prendre cet avion-là. Sinon, pour ce prix, je me serais évidemment passé des services d’Air France. Les deux commerciales de la compagnie, derrière le comptoir, l’ont bien compris. Pas de geste particulier, l’amende max. Elles n’y pouvaient rien. Pour avoir été Gold longtemps, je sais ce qu’est un geste commercial. Mais, comme Jean-Claude, ça ne m’a pas donné l’air moins gogo. Dans le stress d’une situation d’urgence, on n’est pas bien malin.
Plus tard, bien plus tard, j’ai essayé de tirer une conclusion : des offres bien packagées (aller-retour ou autres), qualifiées de ristournes du siècle, accompagnées de pénalités si on n’en utilise qu’une partie, avec une probabilité d’attraper des gogos dans mon genre à 10%, ça devait faire de la tune.
Passons à autre chose, ce n’est pas pareil, mais pas mal non plus. Côté légalité, toujours rien à redire. Du velours. ClickRent loue des voitures, ils sont peu connus, mais on y arrive en passant par CarRental qui a pignon sur web. Vous réservez. Payer sur internet, c’est risqué. Avec une carte de débit, c’est plus sûr. Pas d’info particulière de la part de CarRental, le revendeur, ça roule.
Arrivés au moment de prendre la voiture, on passe à l’accueil, on découvre qu’une carte de débit pour la commande impose de prendre une assurance totale. Pas de problème, ma femme a une carte de crédit. Ah non ! il faut que ce soit un conducteur ! Pas de problème, le deuxième conducteur (j’aime partager la charge) a une carte de crédit. Ah non ! il faut que ce soit vous ! On comprend qu’une entreprise se protège, mais en l’occurrence elle ne prenait aucun risque. Elle érige une règle. Elle a déjà encaissé ma réservation. Je la perds si je ne prends pas l’assurance. Génial non ? Chez ClickRent, on carbure.
Deuxième conclusion : un revendeur qui enrobe des produits dans un blabla sympa ; des clauses tip top auxquelles on ne fait pas attention, mais qui attrapent encore 10% des clients ; il y a de la marge en perspective.
Vous allez penser que les 10% de gaulés ne reviendront jamais vers les boîtes qui les ont eus. C’est parfaitement exact, mais ça n’a d’évidence aucune importance pour elles. Car ça concerne des offres associées à un rabais. Qu’elle soit réelle ou imaginaire, la promotion est faite sur ce thème ; elle ne s’adresse pas aux clients business qui passent par d’autres canaux. Ceux-là seuls intéressent vraiment des compagnies comme Air France ou Click Rent. Si elles perdent 10% de clients par an, il leur faut seulement en attraper 10% de nouveaux.
C’est là où le marché de masse a du bon. En plus, les grosses campagnes de promo sont moins chères quand elles sont couplées à de grandes plateformes de vente sur Internet.
Une mésaventure ne prend son intérêt que d’être partagée. Que partager en l’occurrence ? Premièrement, ne pas se fier aux campagnes de promo des Air France et consorts. Deuxièmement, si on se sent craquer, boire un coup et lire jusqu’au bout les petits caractères des interminables conditions de vente. Troisièmement, privilégier des commerçants de proximité ; au moins on peut aller s’expliquer avec eux. Quatrièmement, aller jeter un coup d’œil du côté d’UFC Que choisir.
Le site est bien. Il y a un petit abonnement, mais c’est pour la bonne cause. Le statut de consommateur réclame un certain accompagnement, c’est finalement la seule conclusion que je tire de ces mauvaises expériences. Y compris si l’objectif est de consommer moins. Et peut-être surtout. Cette page de publicité est purement bénévole. Elle n’est pas sponsorisée, mais on ne désespère pas.
Merci Maurice Zytnicki. Je me sens moins seul.