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Sénatoriales en septembre

Le 24 septembre auront lieu les élections départementales pour la moitié des départements, dont celui des Hauts-de-Seine. Dans le 92, le scrutin se fait à la proportionnelle à la plus forte moyenne, pour élire 7 sénateurs.

Environ 95 % des électeurs sont issus des conseils municipaux. Les scrutins refléteront donc les évolutions des municipales de 2020. Celles-ci avaient vu de nombreuses réélections de sortants, mais aussi des changements dans quelques grandes villes, notamment en faveur des Verts.

Plus généralement, les sénatoriales reflètent, souvent avec beaucoup de retard, les évolutions politiques du pays. Les Républicains dominent largement le Sénat, où le parti Socialiste a un groupe important. La création du parti Horizons aura-t-elle des conséquences au Sénat ?

La désignation des délégués

Le collège électoral est formé des députés et des sénateurs, des conseillers régionaux, des conseillers départementaux, des conseillers territoriaux et des délégués des conseillers municipaux.

Dans les villes de moins de 9000 habitants, une partie seulement des élus municipaux est déléguée. Les conseils municipaux de 7 et 11 membres ont droit à 1 délégué, les conseils municipaux de 15 membres, à 3 délégués, les conseils municipaux de 19 membres à 5 délégués, les conseils municipaux de 23 membres à 7 délégués, les conseils municipaux de 27 et 29 membres à 15 délégués.

Dans les villes de 9000 à 30 000 habitants, les membres du conseil municipal sont tous délégués. Au-delà de 30.000 habitants, le conseil municipal choisit des délégués supplémentaires, à raison d’un par tranche complète de 800 habitants au-dessus de 30.000 habitants.

Dans tous les cas, quelques suppléants sont désignés pour faire face à d’éventuels empêchements de délégués.

Ce système favorise de facto les communes les moins peuplées : même le plus petit village a au moins un délégué (le maire). La possibilité de fortes disparités de représentation des habitants : le Sénat est plus rural que la France.

Les disparités observés dans les Hauts-de-Seine sont plus faibles, car ce département ne compte pas de villages.

Dans le 92, deux villes ont moins de 9000 habitants : Marnes-la-Coquette et Vaucresson. La première compte 1756 habitants et 19 conseillers municipaux. Elle aura donc droit à 5 délégués, soit un pour 351 habitants. Avec 8627 habitants, Vaucresson a 29 élus municipaux et aura droit à 15 délégués, soit un pour 575 habitants.

Avec 20.359 habitants et 33 élus au conseil, Sceaux aura 33 délégués donc un pour 617 habitants. Avec 120.911 habitants, Boulogne-Billancourt choisira 113 délégués en plus de ses 55 élus municipaux. Soit au total, un délégué pour 720 habitants.

Dans les 21 communes du 92 qui comptent plus de 30.000 habitants, l’élection des délégués supplémentaires aura lieu le 9 juin.

Une circulaire publiée le 25 avril 2023 précise la manière dont les délégués sont désignés. Elle compte 38 pages et 3 annexes… On retiendra que, dans les villes de plus de 1000 habitants, les délégués (ou délégués supplémentaires) et leurs suppléants sont élus sans débat au scrutin secret simultanément par les conseillers municipaux, sur une même liste paritaire suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle de la plus forte moyenne.

Certaines personnes peuvent avoir deux mandats qui en font des délégués : par exemple les députés qui sont en même temps conseillers municipaux. Comme le note Gilles Mergy dans un article dans les Nouvelles de Fontenay, il leur faut choisir et désigner un remplaçant pour l’un de ces mandats.

Formellement, c’est le président de la structure dans laquelle ils se font remplacer qui désigne le remplaçant. Mais ce président est obligé de désigner la personne proposée par la personne à remplacer…

Le mode de scrutin

Les sénateurs sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours dans les départements (ou circonscriptions) où sont élus un ou deux sénateurs. S’il y a trois sénateurs ou plus, l’élection se fait à la proportionnelle. Les listes doivent être paritaires. Le vote est bloqué (pas de panachage ni possibilité de barrer un nom). Les sièges sont répartis à la plus forte moyenne.

41 départements (dont 5 outre-mer) désignent 2 sénateurs et 11 (dont 4 outre-mer) en désignent un seul. Paris en désigne 12 et le Nord 11. Les Français établis hors de France en désignent 12.

La répartition proportionnelle à la plus forte moyenne favorise les listes ayant eu le plus de voix, donc les regroupements. La répartition au plus fort reste favoriserait au contraire la dispersion des listes.

Par exemple, lors du scrutin de 2017, il y avait dans les Hauts-de-Seine deux listes avec des candidats issus des Républicains. Au total, elles ont eu trois élus. Une liste regroupée aurait obtenu 4 élus. A condition de recueillir les mêmes voix, ce qui n’est évidemment pas garanti.

Comment composer une liste pour gagner ?

Dans les départements ruraux, beaucoup de maires sont « sans étiquette ». L’appartenance politique des candidats aux sénatoriales n’est donc pas forcément leur premier critère de choix. Mais il n’est pas facile de savoir qu’el est leur véritable critère. On imagine qu’il y a une logique locale : je préfère voter pour le candidat géographiquement proche.

Le sentiment que tel candidat est plus sensible aux problèmes de ma municipalité : maire d’un village rural, je vais peut-être préférer un candidat « rural » » qu’un candidat urbain ». L’expérience supposée peut aussi être un critère. De même que l’aide déjà apportée (ou non) par un sénateur sortant sur un ou l’autre dossier.

Bien sûr, un maire puissant ne choisit pas n’importe qui sur sa liste aux municipales. Mais l’étiquette supposé n’est qu’un des critères de choix. Il peut être utile d’avoir des personnalités connues dans la commune, par exemple à travers une association active. la conséquence est qu’il y a parmi les délégués aux sénatoriales un nombre non négligeables de délégués dont la couleur politique n’est pas connue précisément. Une couleur qui peut aussi avoir varié en 3 ans, dans une période d’évolution du champ politique.

Dans un département comme celui des Hauts-de-Seine où il y a 7 sièges et beaucoup de listes candidates, le premier de liste peut avoir une chance raisonnable d’être élu. C’est parfois le cas du deuxième de liste, exceptionnellement celui du troisième. S’il n’y a qu’un élu, le deuxième a une chance de devenir sénateur si le premier renonce à son siège parce qu’il devient député ou ministre ou s’il décède.

Mais les suivants sur la liste savent qu’ils n’ont aucune chance d’être élus. Ils sont là pour soutenir leur parti, se faire connaitre, rendre service…La liste a besoin d’eux pour représenter les différentes zones du département, montrer son sérieux (par la présence de maires par exemple)

Le scrutin de 2017 dans les Hauts de Seine

En 2017, le 92 a vu 11 listes solliciter les suffrages des délégués. Il y a eu 2275 suffrages exprimés. Trois listes ont eu très peu de voix : la liste EELV a obtenu 1,16% des suffrages, la liste FN en a réuni 0,79% et une liste divers droite 0,31%.

Une seule liste a eu deux élus : la liste menée par Philippe Pezenec (alors maire du Plessis-Robinson) a recueilli 540 voix et près d’un quart des suffrages. Elle se présente comme divers droite « pour les communes et les libertés locales ». Mais plusieurs de ses membres sont des maires LR. Cette liste, en réalité LR, fera élire la plus jeune sénatrice. Christine Lavarde, née en 1984 est passée par l’Ecole Normale Supérieure de Cachan avant d’entrer au corps des Ponts. Elle est depuis 2019 vice-présidente de la commission des finances du Sénat.

Les cinq listes suivantes ont eu un seul élu. Un homme à chaque fois. Le Sénat n’est pas près d’être composé à égalité d’hommes et de femmes.

La liste arrivée en deuxième place est officiellement LR et recueille 385 voix. Pour élire Roger Karouchi. Elle est suivie par la liste UDI (325 voix), menée par Hervé Marseille, de Meudon. Une liste En Marche suit avec 218 voix, menée par André Gattolin. Une liste divers gauche permet l’élection du communiste Pierre Ouzoulas, avec 217 voix. Enfin, la liste socialiste, menée par Xavier Iacovelli obtient 199 voix.

Deux listes arrivent un peu sous la barre. Une liste divers droite menée par une jeune conseillère de Levallois obtient 188 voix. Une autre menée par le maire de Saint Cloud, alors LR, obtient 152 voix.

On notera que 2275 exprimés pour 7 sièges, cela fait 325 voix par siège. La gauche recueille 442 voix en trois listes. La division de la droite contribue à lui assurer ses deux sièges.

Dernière remarque, Xavier Iacotelli élu en 2017 sous l’étiquette du PS, a rejoint en novembre 2019 le groupe La République en marche

Présence locale

Pour attirer les suffrages, les listes s’efforcent d’attirer des maires (même si la place qu’ils occupent sur la liste ne leur donne aucune chance d’être élus). Autre point important : représenter les diverses parties du département.

Sur la liste de Philippe Pezenec, on trouve ainsi Georges Siffredi, maire de Châtenay-Malabry. Philippe Laurent (Sceaux), Laurent Vastel (Fontenay-aux-Roses) et Patrick Donath (Bourg-la-Reine) sont tous les trois sur la liste UDI, aux 3e, 7e et 9e places. Marie-Hélène Amiable, maire de Bagneux est 8e sur la liste organisée autour du PCF. On trouve aussi Maud Bregeon, alors conseillère municipale à Levallois Perret, en 8e place sur la liste LREM.

Les municipales de 2020 dans les Hauts-de-Seine

Les municipales de 2020 voient un changement de majorité dans trois villes : Châtillon et Colombes passe à gauche et Clichy passe à droite. La liste gagnante à Colombes est menée par un EELV.

Colombes compte 86 775 habitants. La ville devrait avoir 126 délégués, dont une centaine pour la majorité municipale. Soit un gain d’environ 72/73 délégués par rapport à 2014.

Clichy compte 62.933 habitants et Châtillon 36.392 : sur l’ensemble des deux villes, la gauche perd quelques délégués. Elle en perd d’autres par-ci par-là, dans des villes dirigées par la droite où la présence d’une liste LREM lui a enlevé une partie des sièges obtenus par l’opposition.

Au total, elle gagnera probablement quelques voix. Probablement de quoi lui garantir ses deux sièges, mais pas lui en assurer un troisième. A condition qu’elle arrive à gérer la montée du nombre d’élus EELV en son sein.

En Marche a présenté des listes spécifiques dans nombre de communes. Sans grand succès. Mais cela fait un certain nombre d’élus malgré tout. Sans compter les sympathisants de Renaissance présents sur des listes élues. On y imagine qu’il y en a parmi les majorités de Châtenay-Malabry, Bourg-la-Reine ou Fontenay-aux-Roses.

Quel pronostic pour 2023 ?

On l’a vu, les changements apportés par les municipales sont assez restreints dans les Hauts-de-Seine. Cela ne signifie pas que les sénatoriales se passeront de la même manière qu’en 2017. D’abord parce qu’il y a d’importantes composantes personnelles.

Ensuite parce que le paysage politique a bougé depuis. Xavier Iacotelli en est un parfait exemple, lui qui fut élu sur une liste socialiste avant de passer chez En Marche.

Horizons, le parti lancé par Édouard Philippe a-t-il attiré des élus dans le 92 ? Ceux-ci vont-ils rejoindre une liste organisée autour de Renaissance ?

André Gattolin, élu à la tête de la liste LREM en 2017 a annoncé qu’il ne se représentait pas. Mais si Iacovelli prend la tête d’une liste Renaissance, la question porte sur le nom de la deuxième de liste. Car cela doit obligatoirement être une femme…

Problème valable pour toutes les listes. Philippe Pezenec peut constituer une liste avec Christine Lavarde juste derrière lui, comme en 2017. Mais si la tête de liste est un homme, la deuxième place est pour une femme. Au grand dam des hommes qui se verraient volontiers au palais du Luxembourg ! S’il est une institution qui garde encore un certain prestige, c’est bien le Sénat. Raison de suivre une campagne indécise par nature et dont les protagonistes ne sont pas encore connus quelles listes, quels candidats et candidates ?

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