Une loi, votée le 1er mars, prend des mesures concrètes face aux conséquences d’agression de la part d’un conjoint. Dans le cas conjugal, le problème crucial est de pouvoir se reloger et subvenir à ses besoins minimaux. Pour soi et souvent pour ses enfants.
Premiers secours
Pour aider les victimes à quitter leur domicile et prendre un nouveau départ, la loi prévoit d’octroyer une aide d’urgence sous forme de prêt sans intérêt ou de don, en fonction de la situation financière et sociale de la victime.
Cette aide universelle pourra être demandée au moment du dépôt de plainte ou du signalement. Elle sera transmise à la caisse d’allocations familiales (CAF) ou à la caisse de la Mutualité sociale agricole (MSA). Le montant de l’aide pourra varier selon les besoins de la personne, dans la limite de plafonds. Cette aide d’urgence sera applicable d’ici fin 2023 maximum.
Le remboursement du prêt pourra être mis à la charge du conjoint violent, dans la limite de 5.000 euros. Le texte prévoit également la création d’une loi de programmation quinquennale pour lutter contre les violences faites aux femmes.
Il faut souligner qu’en France, le nombre de victimes de violences conjugales a augmenté de 20% en 2021. Ce furent 122 femmes tuées par leur conjoint (une tous les 3 jours !). A inscrire dans les violences intrafamiliales qui, si elles ne portent pas seulement sur les femmes, sont d’un poids considérable. Elles représentent environ la moitié des coups et blessures volontaires (sur personnes de 15 ans ou plus), soit plus 150.000 par an.
Le pack
Cette loi arrive dans un contexte où des mesures d’accompagnement d’urgence étaient déjà en gestation. Vendredi 3 mars, sur France 2, Isabelle Rome, ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes, annonçait l’expérimentation dans le Val-d’Oise du « pack nouveau départ ». C’est un nouvel outil de lutte contre les violences conjugales.
Son but : « permettre à ces femmes de partir avant qu’il ne soit trop tard. » Elles pourront se rendre dans une association, un commissariat ou même en mairie et signaler leur situation auprès d’un seul référent. Cette alerte permettra de débloquer les aides financières nécessaires à un nouveau départ.
Surtout, la ministre veut éviter que la victime de violences « aille frapper à plusieurs portes ». En d’autres termes que la victime ait un seul interlocuteur capable de déclencher toutes les mesures. « Ça peut être une allocation, poursuit la ministre, un système coupe-file pour la garde des enfants, une insertion professionnelle ou une formation, un hébergement d’urgence, un accompagnement psychologique. »
Ancienne magistrate, elle connaît bien ces cas de violence et y est particulièrement sensible : « J’ai présidé des cours d’assises, jugé de nombreux féminicides. Je constatais qu’il était très difficile pour les victimes de partir, de s’extraire des griffes de leur bourreau, souvent elles devaient faire plusieurs allers et retours. »[1]
Le « pack nouveau départ » sera testé pendant douze semaines dans le Val-d’Oise. « Puis dans quatre autres territoires, dont un rural et un territoire des Outre-mer ».
Un résultat du Grenelle
Il provient du « Grenelle contre les violences conjugales », que le gouvernement avait organisé de septembre à novembre 2019. Il s’était traduit par des mesures visant à « favoriser le signalement des cas de violence, la protection des victimes, le suivi des auteurs de violence, la sensibilisation des personnes, ainsi qu’à mieux sanctionner les auteurs. »[2]
Parmi ces mesures, outre le « pack nouveau départ », ce sont des places supplémentaires d’hébergement. Elles sont désormais de plus de 10.000. Pour les femmes victimes de violence, il existe aussi (depuis 2015), le « téléphone grave danger » (TGD) un portable avec une touche dédiée pour joindre un service de téléassistance accessible 7j/7 et 24h/24 et permettre l’intervention immédiate des forces de l’ordre. « Au 2 novembre 2022, 4 526 TGD étaient ainsi déployés en juridiction »[3].
Le réseau des intervenants sociaux en commissariats est renforcé. Du côté employeur est prévu le déblocage de l’épargne salariale de façon anticipée pour les victimes de violence conjugale.
Ces mesures ne résolvent certes pas tous les drames. Mais elles ont le mérite d’exister, autant les faire connaître. Le site du ministère de l’égalité entre les femmes et les hommes en donne la liste. [4]
[1] Propos rapportés dans Le Figaro du 26/11/2022
[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Grenelle_des_violences_conjugales
[3] https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/prevention-et-lutte-contre-les-violences-sexistes-et-sexuelles
[4] idem
Dans le même temps je vois une loi sur les retraites qui n’est pas faite pour arranger leur sort, et une et une autre sur l’IVG qui ne va guère favoriser leur liberté. Sans compter l’inégalité des salaires qui persiste dans un bruissement permanent où l’on dénonce cette anomalie sans entendre beaucoup d’indignation. Les hommes de notre beau pays républicain se sentiraient-ils menacés ?
Merci de ces précisions.
Je profite de cet échange pour signaler une parution récente sur le blog de l’Insee : à propos des inégalités hommes/femmes
https://blog.insee.fr/evolution-inegalites-femmes-hommes/
On peut y lire parmi 10 points celui-ci :
9-Les femmes restent les premières victimes de violences conjugales
Entre 2011 et 2018, en moyenne chaque année, 295 000 personnes âgées de 18 à 75 ans ont déclaré avoir été victimes de violences conjugales (violences physiques et/ou sexuelles exercées par le conjoint ou l’ex-conjoint) en France métropolitaine. Parmi elles, 213 000 sont des femmes, soit 72 % des victimes [SSMSI, 2019]. Peu de victimes déclarent porter plainte (14 % d’entre elles, 18 % s’agissant des femmes). En prenant en compte les violences survenues depuis l’âge de 15 ans, en 2021, c’est 1 femme sur 6 âgée de 18 à 75 ans (16 %) qui déclare avoir subi au moins une fois depuis l’âge de 15 ans des violences physiques ou sexuelles par partenaire contre 1 homme sur 18 (6 %). En outre, davantage de femmes cumulent les deux types de violences (8 fois plus souvent que les hommes) [SSMSI, novembre 2022].
Bonjour,
Mon point est le suivant : la loi protège les « victimes de violences conjugales » et non ‘Les femmes ». Cette nuance importante ne ressort pas dans le titre général choisit par la gazette « protéger les femmes »; cette derniere phrase pourrait en effet laisser entendre que les femmes ont de manière génerale et par nature, besoin d’etre protégées (ie elles sont plus faibles que les hommes); cette idée est choquante, elle a par ailleurs conduit ds certains de pays ou dans certaines situations á une privation de la liberté des femmes sous pretexte de les « protéger ». Voilá pourquoi j’ai réagi.
Liliane, nous ne voulions pas, avec cet article, laisser penser que les femmes sont plus à protéger que les hommes : votre remarque montrant qu’il y a une ambigüité possible, nous changerons volontiers le titre. Nous allons voir comment.
On notera que le « Plan interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes » comprend 4 axes, dont 2 sont centrés sur la notion d’égalité (Égalité professionnelle et économique, Culture de l’égalité), les deux autres étant centrés sur les femmes (Lutte contre les violences faites aux femmes et Santé des femmes)
Cela reflète la difficulté à tenir le cap entre deux demandes exprimées au sein de la société : une demande d’égalité d’une part, une demande d’action spécifiquement en faveur des femmes d’autre part.
Je suis un peu choquée par votre titre « protéger les femmes ». Je sais que ce n’était pas votre propos mais je trouve le titre malvenu en ce sens qu’il renvoit en première lecture à l’image classique de femmes faibles à « protéger » malgré elles. Elles ont (comme les autres types de victimes) besoin que les violences qu’elles subissent soient pleinement reconnues et qu’on leur donne les moyens (yc financier) de SE proteger et de se DEFENDRE. Une suggestion pour votre titre « Renforcer les droits des femmes victimes de violence ».
Liliane, votre commentaire soulève deux questions. différentes La première, le titre lui-même. Il nous semble traduire l’esprit de la loi. Les mesures simplifiant l’installation d’une femme hors les violences qu’elle subit sont en effet … protectrices!
L’expression que vous proposez est sûrement plus exacte. Mais un titre est toujours assez ramassé. Trop pour vous, semble-t-il. L’essentiel est que vous n’y voyiez pas mauvaise intention.
La seconde est la représentation des femmes que suggère selon vous le titre. Et là, commence une question en effet cruciale et qui prend un tour assez « compulsif » dans les médias. Reconnaissez que le nôtre n’en ‘est certainement pas l’initiateur ni l’influenceur ;-).
LGdS est très ouverte à un débat ou un entretien sur le sujet. Il serait bien utile.
Je comprends tout à fait les femmes battues c’est normal encore faudrait il prouver qu’il y ait vraiment eu des coups donnés. Quid des fausses déclarations de femmes parfois quelques semaines après les sois disants faits ? Il est à mon avis trop facile de prendre une plainte pour coup comme parole d’évangile. Un examen médical doit être fait au préalable.
De plus quid des violences faites aux hommes par les femmes ?
Il y a sûrement certaines femmes qui pourraient mentir et des hommes victimes de violences conjugales. Mais les victimes de violences conjugales sont avant tout des femmes. C’est bien que l’article rappelle les mesures de protection.