Depuis 2014, dans une des classes de 4ème et une de 3ème, toutes deux dénommées Challenge, l’IND pratique une méthode pédagogique originale autour de la coopération entre élèves de niveaux différents. La coopération par binôme vient renforcer les apports de l’enseignant et aide les élèves à se les approprier.
Composition des classes Challenge
Chaque classe compte 30 élèves, un peu moins que les autres classes, de 33 ou 34 élèves. La moitié des élèves ont été considérés l’année précédente par leurs enseignants comme ayant des facilités et une capacité à collaborer : on leur demandera d’aider un autre élève. L’autre moitié des élèves ont été évalués comme ayant besoin de plus de temps que la moyenne pour apprendre malgré des efforts évidents, et étant prêts à accepter une aide.
Le choix a été validé par les élèves eux-mêmes, avec l’accord des parents. Les élèves ont été informés au troisième trimestre de 5ème par les élèves de 4ème en classe Challenge. En pratique les deux tiers des élèves sont des filles.
En début d’année (après un temps pour faire connaissance) des binômes aidants/aidés sont constitués. Les membres d’un binôme sont installés l’un à côté de l’autre en classe et en TP. Des changements de binômes peuvent avoir lieu en cours d’année.
Les professeurs qui interviennent dans cette classe sont volontaires pour le dispositif.
Fonctionnement
La majorité du temps en classe Challenge est identique à ce qui se passe dans les autres classes. Les temps plus spécifiques se déroulent en trois phases : d’abord une présentation et une question posée par l’enseignant. Puis un temps de travail en binôme pour y répondre. Enfin un temps de mise en commun pendant lequel l’enseignant s’arrange pour que ce soit l’élève aidé qui apporte la réponse. En fonction des réponses données, l‘enseignant ajoute des précisions ou des explications.
La manière dont se fait ce travail en binôme va dépendre de la matière enseignée et donc de chaque enseignant.
Objectifs
La création de ces deux classes a succédé à une démarche pédagogique qui n’avait pas été jugée satisfaisante. Celle-ci, nommée Privilège réunissait uniquement des élèves en difficulté qui bénéficiaient de renforts dans certaines matières. Avec le temps, on a constaté qu’il était compris comme une baisse du niveau d’exigence et était ressenti par les élèves comme une stigmatisation. Le nom de la démarche Challenge montre qu’il ne s’agit pas de diminuer le niveau, au contraire, mais de s’appuyer sur l’apport d’élèves moteurs pour tirer les autres vers le haut ou les faire avancer.
L’apprentissage et l’acquisition des notions, des compétences, s’appuie en particulier dans cette classe sur une relation entre élèves qui fonctionne différemment de la relation professeur/élève et la complète.
L’objectif est aussi que chacun des élèves de la classe s’y retrouve, les aidés comme les aidants.
Résultats
La responsable des 4ème, Lisa Chouen, cite comme premier résultat un regain de confiance en soi des élèves, aidés comme aidants.
Le flyer laissé aux 5ème par ceux qui leur présentent la classe Challenge résume en quelques mots le ressenti des élèves de cette classe : relevez le challenge, entraide, esprit d’équipe, bonne ambiance, super binômes.
Le directeur de l’IND, Frédéric Gautier, observe qu’il ne dispose pas d’un dispositif précis d’évaluation de la démarche pédagogique, permettant par exemple d’identifier les avantages ou inconvénients selon les matières ou selon les comportements, pour les aidés d’une part, pour les aidants d’autre part. Il considère de toute manière que les résultats doivent être jugés sur le temps long d’une scolarité.
Des critères précis ne sont pas encore établis mais un certain nombre d’éléments montrent de toute façon un réel bénéfice à cette approche. C’est pour cette raison que la direction a maintenu Challenge depuis 2014.
Ce que montrent les études
Deux économistes, Yann Algan et Élise Huillery ont publié en 2022 Économie du savoir-être. Dans cet ouvrage, en s’appuyant sur de nombreux travaux de recherche publiés dans le monde, ils montrent l’importance de certaines compétences comportementales et sociales dans la réussite scolaire puis dans l’entreprise. Par exemple la confiance en soi et la capacité à coopérer. Ils notent que ces compétences sont beaucoup moins développées chez les jeunes Français que dans la plupart des pays développés. Ils citent de nombreux dispositifs dans le monde qui ont visé à développer ces compétences chez des jeunes avec des résultats remarquables. On trouvera ici un résumé du livre et là une courte vidéo où Élise Huillery explique l’importance de ces compétences.
L’ouvrage aborde la question du travail coopératif en classe. « Une synthèse menée à partir de 65 études montre un fort effet du travail coopératif sur les résultats scolaires ». Une étude visant plus spécifiquement les meilleurs élèves montre que « tout le monde bénéficie des aspects positifs du travail coopératif, et notamment les meilleurs élèves, car leurs pairs les incitent à s’améliorer et à apprendre » (page 52).
Dans sa réflexion sur l’avenir, la direction envisage plusieurs pistes. Frédéric Gautier, le conseil de direction et les équipes vont entamer une réflexion sur le maintien de cette classe sur le niveau 3ème. En effet, il semble important pour les élèves de reprendre une dynamique habituelle avant l’entrée au lycée. Il serait peut-être plus pertinent de le proposer sur la classe de 5ème et avoir ainsi les deux premières années du cycle 4 concernées.
Une autre idée, beaucoup moins avancée, consisterait à systématiser la démarche à toutes les classes d’un même niveau.
Autre article sur l’IND : Avec le chef d’établissement de l’Institut Notre-Dame à Bourg-la-Reine
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