Directrice des Gémeaux depuis 3 ans, Séverine Bouisset poursuit deux objectifs : s’inscrire dans la continuité de sa prédécesseuse, Françoise Letellier, et ancrer la scène nationale dans son territoire, au plus près de ses habitants.
Les Gémeaux, scène nationale
D’abord centre d’animation culturelle inauguré en 1970, baptisé Les Gémeaux en référence aux villes de Sceaux et de Bourg-la-Reine, transformé ensuite par de grands travaux de reconstruction, le théâtre des Gémeaux devient scène nationale en 1994. Il compte deux salles de théâtre (510 et 179 places) et une salle de 150 places réservée au jazz (le Sceaux What).
En tant que scène nationale, Les Gémeaux proposent une programmation pluridisciplinaire dans trois domaines : le théâtre, la danse et le jazz, et bénéficient de subventions de l’État, la région, le département et VSGP. A noter que les Hauts-de Seine comptent deux scènes nationales : Les Gémeaux et le Théâtre 71 de Malakoff.
Continuité et approfondissement
Au-delà des trois piliers (théâtre, danse et jazz), la programmation des Gémeaux a toujours été marquée par deux singularités : le principe de « série » (le fait de programmer un artiste au-delà d’une seule représentation) et la dimension internationale. Séverine Bouisset pousse plus loin la démarche. D’abord en programmant davantage de « séries ». Ensuite en ouvrant la musique et la danse à une programmation internationale, qui ne s’appliquait, jusqu’alors, qu’au seul théâtre.
Séries
Il suffit de regarder la brochure de saison pour observer la volonté, aux Gémeaux, d’offrir au public la possibilité de choisir le jour de sa venue et aux artistes une visibilité plus importante. C’est particulièrement le cas pour la danse : sur 8 spectacles programmés au cours de la saison 2024/2025, un seul (le dernier) se déroule sur une journée, tandis que les sept autres jouent 2, 3 ou 4 fois.
Programmer sur plusieurs jours, c’est évidemment prendre plus de risque en matière de fréquentation (il faut remplir plusieurs fois la salle).
International
Tout en poursuivant la tradition d’accueil d’artistes étrangers, la nouvelle directrice introduit deux innovations. Jusque-là réservée au théâtre, elle étend désormais cette pratique à la musique et à la danse. Elle a ensuite placé sa programmation sous le signe de la « découvrabilité », en invitant des artistes inconnus en France, mais renommés à l’étranger. L’objectif : faire découvrir au public des Gémeaux de grands artistes de la scène internationale.
Dans la continuité de la saison précédente, Les Gémeaux soutiennent encore pour la saison 24-25 des artistes exilés en raison de conflits dans leurs pays. Du 28 novembre au 8 décembre, Les Gémeaux accueilleront l’immense Youri Boutoussov, lauréat de six Masques d’Or en Russie, avec une mise en scène de Rosencrantz et Guildenstern sont morts, une première en France.
Familles et jeunes
Depuis 3 ans, le théâtre des Gémeaux élargit son offre en direction des familles et du jeune public. Cette saison, ce sont plus de quinze propositions à partir de 3 ans, parmi lesquelles :
Pulse, donné le 28 septembre à la résidence des Bas-Coudrais dans le cadre de l’événement Tous aux Blagis, Les Petits touts, présentés à l’Agoreine de Bourg-la-Reine le 12 octobre (à partir de 4 ans), la pièce de théâtre Neige, donnée les 9 et 10 novembre et enrichie par un atelier de pratique théâtrale pour adultes et adolescents (dès 10 ans), l’installation Les Hommes debout, présentée en accès libre dans les halls du théâtre, pendant 15 jours au mois de novembre (dès 6 ans), ou encore Bout à bout, un spectacle de cirque d’objets, présenté le 17 mai au CAEL de Bourg-la-Reine (à partir de 3 ans).
Arts numériques
De nouveaux spectacles émergent dans la programmation des Gémeaux, faisant la part belle à la création immersive et numérique, propice à déplacer la perception du spectateur. Cette saison, trois propositions sont ainsi programmées : Les Aveugles, du 11 au 14 décembre, La fin du présent, du 12 au 14 décembre, mais aussi l’installation Les Hommes debout de la compagnie lyonnaise AADN (Assemblée Artistique des Diversités Numériques). Cette installation met en scène 16 mannequins qui restituent la parole de femmes et d’hommes habitant le quartier des Blagis. Accueillie en partenariat avec le Plus Petit Cirque du Monde, elle se tiendra aux Gémeaux du 7 au 22 novembre, en entrée libre, dès 6 ans.
Ancrage territorial
Quatre artistes accompagnent Les Gémeaux depuis 2021 et le feront jusqu’à la fin de la saison 24-25 : Anne Paceo, Mickaël le Mer, Margaux Eskenazi et Julien Dubuc. Le théâtre met à leur disposition ses plateaux et l’équipe technique, et coproduit financièrement leurs nouvelles créations. L’équipe des Gémeaux s’appuie par ailleurs sur ces artistes pour construire, avec eux, des projets de sensibilisation et de pratique artistique sur le territoire.
Car, depuis sa prise de fonction, Séverine Bouisset inscrit l’ancrage territorial comme un objectif prioritaire, synonyme, pour elle, de lien avec les habitants, avec les structures socioculturelles locales. Pour se faire, elle a créé un service dédié, pour aller rencontrer le public ailleurs qu’au théâtre.
Cette saison un projet d’envergure est mis en place autour de la danse. Réunis en 4 groupes, des habitants, collégiens et élèves du Conservatoire de Sceaux/Bourg-la-Reine vont pouvoir travailler avec la compagnie de Mickaël le Mer (chorégraphe) pour créer Extension, une œuvre qui sera présentée le 22 juin 2025 au parc de la Ménagerie lors de l’évènement « Alors on danse ! ».
L’ancrage local passe aussi par la programmation de petites formes, des spectacles légers techniquement, et joués dans des lieux non dédiés à la culture (écoles, foyers, maisons de retraite etc.). Ces petites formes pourraient, un jour, être jouées chez l’habitant ! Un projet que l’équipe aimerait développer.
Les Gémeaux veulent sortir de leurs murs : pour preuve, le spectacle La Mémoire de l’eau, joué en novembre 2023, à la Piscine des Blagis.
Coopération locale
Le théâtre s’attache à tisser un réseau de collaborations avec ses voisins. Le cinéma d’abord, programmé en partenariat avec la ville de Bourg-la-Reine. Les projections ont lieu à l’auditorium du Conservatoire de cette ville.
Pour le cirque ensuite, avec La Conférence des oiseaux du 21 au 26 mars en partenariat avec L’Azimut- Pôle national cirque ; L’oiseau-ligne les 23 et 24 mai est monté avec la complicité du Plus Petit Cirque du Monde de Bagneux.
Avec le Théâtre de Châtillon, sera présenté La fin du présent, les 12, 13, 14 décembre aux Gémeaux.Les 20 et 21 mars EXIT ABOVE – d’après la tempête sera donné à Malakoff-Scène nationale.
On se souvient aussi du Sceaux Jazz Festival, donné au parc de Sceaux du 13 au 16 juin 2024.
Très concrètement, une rencontre a lieu tous les deux mois entre responsables des scènes locales (Malakoff, l’Azimut, le Plus Petit Cirque du Monde…).
Public et élitisme ?
La question de l’ancrage territorial pose celui du public recherché et d’un élitisme supposé. Les Gémeaux, une scène réservée aux parisiens ?
Sur ce point, Séverine Bouisset est très claire. D’abord pour dire qu’il n’y a que 30 % de « parisiens » dans le public des Gémeaux, 70 % venant du territoire Vallée-Sud-Grand-Paris. Et qu’elle observe une augmentation régulière des abonnés habitant Sceaux ou Bourg-la-Reine.
Pour elle, la programmation exigeante et de qualité des Gémeaux est pour tout le monde. C’est aussi pour cela qu’elle veut aller vers les gens, proposer des ateliers, sortir des murs. Les Gémeaux, c’est le théâtre de tout le monde.
Handicaps
Tout le monde, ce sont aussi les personnes en situation de handicap. Des travaux importants ont été réalisés il y a deux ans pour améliorer l’accessibilité. Des spectacles en audiodescription sont désormais proposés chaque saison, ainsi qu’une boucle à induction magnétique. C’est aussi toute l’équipe qui a été formée sur le sujet en septembre.
Accueil
A l’été 2023, les halls d’accueil ont été rénovés, pour plus de convivialité. On y trouve aujourd’hui une bibliothèque collaborative, des bureaux de travail partagés, symboles d’une volonté de convivialité et d’hospitalité.