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Le prolongement du T10 en débat

Une réunion publique s’est tenue le 20 avril autour du projet de prolongement du T10 jusqu’à Clamart et l’interconnexion avec la ligne 15 du Grand Paris Express. Elle fut l’occasion de la présentation des avis respectifs de divers acteurs, responsables politiques et associations. Elle concluait la concertation lancée en février par IDF Mobilités. Celle-ci se termine le 24 avril (soit lundi prochain) et envisage les alternatives en surface ou en tunnel.

Ces alternatives ont le même but : permettre la correspondance avec la future ligne 15. Elles ont un coût élevé : environ 800 M€ pour 3,1 km (pour le tunnel, proposition dite de référence) à comparer aux 386 M€ pour 8,2 km du projet initial. Pour une raison simple : le passage dans un milieu déjà très dense.

D’autres perspectives ont été officiellement abandonnées : le prolongement vers Issy, le terminus initial (Place du Garde à Clamart) ou le maintien du terminus actuel (Jardin parisien). Les avis déjà exprimés montrent que le débat s’est pourtant déplacé entre la solution de référence et l’abandon du prolongement. .

Un projet déjà ancien

Approuvée par le STIP en 2011, la réalisation du T10 a été déclarée d’utilité publique en 2016, après l’enquête publique de 2015. Les premiers travaux ont débuté fin 2017. En juin 2020, il est décidé de réaliser d’abord un premier tronçon de la Croix de Berny jusqu’à Jardin parisien, soit 13 des 14 stations prévues. En parallèle de nouvelles études sont lancées pour une correspondance avec la ligne 15.

La déclaration d’utilité publique a été annulée le 20 juillet 2021 par le tribunal administratif. Les opérateurs (IDF Mobilités et ses financeurs) ont fait appel et continué les travaux. L’une des auteurs du recours, l’Association Châtenay Patrimoine Environnement (ACPE), a déposé un « cahier d’acteur » dans le cadre de la concertation actuelle. Elle y détaille les raisons de son avis défavorable au projet de prolongement.

Selon Wikipédia, la décision de reporter les travaux prévus entre Jardin parisien et place de la Garde était liée à « la volonté de la commune de Clamart d’ajouter une voie routière » dans la partie qui traverse la forêt de Meudon.

La mise en service du premier tronçon est prévue en juillet 2023. Le deuxième tronçon concerné par la concertation (la prolongation) pourrait être mis en service vers 2032 (au plus tôt).

La réunion de clôture du 20 avril

Lors de six réunions publiques, les responsables d’IDF Mobilités ont présenté et expliqué le projet. La dernière a eu lieu à la salle Hunebelle à Clamart et a réuni une centaine de personnes, pour la plupart âgées.

Le premier temps a été consacré à une rétrospective de la concertation. Les élus présents, Georges Siffredi, Carl Segaud, Jean-Didier Berger et Benoît Blot, se sont félicités de l’importante participation et de la qualité du débat qui s’est déroulé jusqu’à présent.

Deux représentantes de la Commission nationale du débat public ont expliqué leur rôle : garantir que les citoyens puissent s’exprimer pour « améliorer la décision ». Elles ont alerté le public sur le fait qu’il s’agissait d’une concertation préalable : toutes les études ne sont pas faites. Il est donc normal que les experts d’IdFM ne puissent pas répondre à certaines questions précises.

Quatre représentants d’IdFM, dont le directeur et les deux chefs de projet, ont également souligné la qualité du débat. Ils ont rencontré environ 1000 personnes et 3000 ont donné leur avis par écrit.

Une personne du public a noté que 3000 sur une population concernée estimée par Siffredi à 200.000 habitants, cela ne faisait que 1,5%. Les membres de CNDP et d’IdFM ont estimé que ce pourcentage était plutôt dans la moyenne haute.

L’un des chefs de projet a donné une synthèse des premiers retours. Selon lui, l’intérêt du projet est conforté (il répond à un besoin réel et important). Le coût du projet est cependant un point d’attention. Deux questions ont  été éclairées :

Quel moyen ? Le tramway constitue une offre performante et assure la continuité du trajet. Mais le bus est une autre solution mise en avant dans le débat.

Quelle solution ? Le tunnel parait plus satisfaisant que la solution en surface. Plus rapide, plus fiable. Mais la question des accès et correspondances est à approfondir. Il y a également des questions sur les travaux et la mise en œuvre.

Interventions de différents acteurs

La parole a ensuite été donnée à des représentants d’institutions ou associations ayant déposé « un cahier d’acteurs », en pratique un avis argumenté. Ces cahiers d’acteurs sont consultables sur le site à une page dédiée.

Charles-Emmanuel Thuret, pour la Société du Grand Paris, insiste sur l’importance de l’interconnexion dans le projet qu’il représente. Le prolongement envisagé participera au maillage en cours de mise en place. Il ajoute l’intérêt des tunneliers dans le creusement des tunnels.

Jean-Didier Berger explique que l’ouvrage visé contribuera très utilement aux objectifs de VSGP : ceux du Plan Air Climat Énergie Territorial (PCAET) ne peuvent être atteints qu’avec des transports en commun de haut niveau. Il redit sa préférence pour la solution en tunnel.

Marie-Catherine Poirier, pour l’association des usagers des transports (AUT) de Clamart, remercie les représentantes de la CNDP.  Elle regrette la pression de la mairie sur la solution du tunnel. Puis écarte la solution de surface qui pose trop de problèmes.

L’oratrice pointe de nombreux défauts à la solution tunnel : incertitudes sur le sous-sol, 25 immeubles détruits, atteintes à la forêt et aux jardins à l’entrée du T10. Elle déplore l’absence de bilan carbone du projet. Et relève enfin le coût très important, 250M€ du km. Elle conclut en proposant de conserver le projet initial (terminus place de la Garde) et de revoir les études.

Trois orateurs lui succèdent avec la même conclusion : Daniel Colleaux de l’association Vivre à Clamart, Pierre Salmeron pour FNE Sud Environnement et Roland Rabeau de Clamart Citoyenne. Ils ajoutent d’autres arguments.

Daniel Colleaux note que depuis le Covid les comportements de mobilités ont changé et se demande ce qu’il en sera dans 10 ans. Il s’interroge donc sur l’intérêt économique.

Pierre Salmeron rappelle que son association avait déposé un recours qui a conduit à l’annulation de la déclaration d’utilité publique du T10. Il estime donc qu’une étude d’impact globale doit être menée. Il estime aussi que le projet fait doublon avec le projet de prolongement de la ligne 4 déjà inscrit au schéma directeur d’Ile-de-France.

Roland Rabeau estime que les solutions alternatives ont été écartées très vite, avec peu d’explications. Il trouve la communication institutionnelle intense, partielle et partiale. Il pense urgent d’attendre.

De son côté, William Serrano pour « les dérailleurs de Clamart » avance que le projet est l’occasion de compléter le maillage vélo et propose une piste cyclable dans le tunnel.

Avis en ligne

Le 20 avril, près de 1800 avis avaient été déposés en ligne. Une analyse sur plus de 100 d’entre eux montre que la solution en surface recueille peu d’avis positifs. Le débat semble surtout entre le refus du projet et la solution tunnel. Certains avis sont très courts : « Ces travaux seront un enfer pour les habitants ». Ou : « Je suis favorable à un prolongement du T10 jusqu’à la gare de Clamart ».

D’autres sont plus développés. Ceux qui refusent le projet pointent notamment son coût ou les impacts environnementaux. La solution par amélioration du service des bus est mise en avant.

Ceux qui approuvent la solution tunnel pointent l’avantage pour les parcours en transport en commun, la contribution au dynamisme de la ville ou les avantages par rapport à la solution en surface.

Il est encore possible de donner son avis jusqu’à lundi 24 avril.

Augmenter ou non la part des transports en commun

De fait, la concertation ne s’est pas organisée autour de l’alternative sol/tunnel proposée, mais sur le bien-fondé (ou non) d’un prolongement.  Quelques données sur les mobilités sont à prendre en compte.

Au sein du territoire VSGP, les déplacements pour le travail se font à 54% par transports en commun et à 27% en véhicule léger (voiture, camionnette). Ces pourcentages sont inversés au Plessis-Robinson. A Châtenay-Malabry, la part des transports en commun est de 35%, celle des véhicules légers de 51%. Clamart est la seule autre commune de VSGP où l’utilisation des véhicules légers est supérieure (de peu) à celle des transports en commun. À titre de comparaison, à Paris, qui bénéficie d’un réseau de transport en commun extrêmement dense, la part des transports en commun est de 64%, celle de la voiture de 11%.

Il n’y a pas de doute que l’accès facile au réseau de transport RER et métro explique ces différences. La situation changera pour Clamart avec l’ouverture maintenant prochaine de la ligne 15. Mais pour Le Plessis-Robinson et pour Châtenay-Malabry, le prolongement du T10 est clairement un moyen de diminuer la part de la voiture.

Le Plessis-Robinson et Châtenay-Malabry sont deux villes qui construisent beaucoup. Elles ont besoin d’être désenclavées, au moins en ce qui concerne les transports en commun.

A cet égard, le projet de prolongement est une solution utile. La question de son coût se pose cependant. Les trois villes de Clamart, Le Plessis-Robinson et Châtenay-Malabry comptent ensemble environ 65.000 actifs, un effectif qui devrait augmenter dans les prochaines années. Il faudrait faire basculer 30 % de cet effectif vers les transports en commun. Soit environ 20.000 personnes. Le T10 n’y suffira certes pas. Mais en admettant que ce soit la cible, les 800 M€ annoncés donneraient un coût de l’ordre de 40.000 euros par personne ayant changé sa mobilité.

Le paramètre financier, comme d’habitude, n’est pas neutre dans la décision à prendre. Il est à mettre en balance avec la diminution des déplacements individuels dont on sait combien ils contribuent aux émissions de CO2.


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