La DREES a publié une analyse des parcours de patients lors de la première vague de l’épidémie. On va donc pouvoir parler des conséquences de la Covid (décès, séquelles) avec un peu plus de données.
Une étude sur près de 100 000 personnes
L’étude porte sur les personnes hospitalisées entre le 1er mars 2020 et le 15 juin 2020, soit 90 778 personnes. Au 22 septembre, 880 personnes (1 %) sont toujours hospitalisées (dont 558 en SSR et 19 en soins critiques). SSR signifie: soins de suite et de réadaptation.
17 367 (19 %) sont décédées à l’hôpital, dont 60 % d’hommes, et 9133 personnes de plus de 80 ans (soit 53 % du total). 131 des personnes décédées avaient 40 ans ou moins.
La moitié des décès ont lieu pendant la première semaine d’hospitalisation et 23 % des décès pendant les 3 premiers jours. On comprend pourquoi le professeur Raoult ne compte que ceux qui ont pris son traitement pendant au moins 3 jours.
Un petit quart des décès se produisent dans la deuxième semaine et le dernier quart (27 %) plus tard (dont 4 % après plus de 6 semaines).
Le taux de décès a évolué dans le temps : autour de 30 % dans les premiers jours de mars, il est passé à 25 % en deuxième quinzaine de mars. Il n’était plus que de 15 % (voire moins) à partir du mois de mai.
Quel taux de mortalité ?
Le taux de décès parmi les hospitalisés (19 % en moyenne sur la période) ne représente pas le taux de mortalité du Covid, puisque seule une petite partie des personnes contaminées est hospitalisées.
Le taux de mortalité à l’hôpital est donc influé par la politique d’hospitalisation (à partir de quelle gravité hospitalise-t-on les malades ?) qui peut être affectée par la situation de l’hôpital. Par ailleurs, le taux de mortalité est très variable selon l’âge.
L’étude de la DREES montre que la baisse de la mortalité dans le temps ne s’explique pas par un effet « pyramide des âges ». Les choix d’hospitalisation ont pu jouer un rôle, mais il y a manifestement eu un effet d’apprentissage.
Le taux de mortalité à situation égale semble avoir baissé d’environ 40/50 % en deux mois (meilleures pratiques de ventilation à l’arrivée et utilisation de corticoïdes pour lutter contre les orages de cytokines mais ces explications ne sont pas dans l’étude). A noter que le conseil scientifique, dans sa note du 24 septembre, estime la baisse de la mortalité à 25 %.
Cette baisse est une moyenne et rien n’indique qu’elle soit identique selon les classes d’âge. La seule chose qu’on peut donc retenir est que les pratiques médicales sont devenues plus efficaces, malgré l’absence de traitement contre le virus lui-même (on traite les symptômes).
Un rôle essentiel de l’âge
Le taux de mortalité des personnes contaminées est impossible à définir sans préciser la pyramide des âges de la population, tant il varie selon ce paramètre. Le taux de mortalité moyen dans la population française peut être calculé si on connaît la proportion de personnes contaminées.
La pyramide des âges des personnes hospitalisées montre aussi un effet de l’âge (peu de jeunes hospitalisés).
On peut faire des hypothèses sur la part de personnes contaminées sur la période et admettre que le taux de contamination ne dépend pas de l’âge.
Il faut aussi tenir compte des décès hors hôpital. D’après l’INSEE, la surmortalité de mars et avril par rapport à 2019 est de 7700 personnes pour les décès à domicile et de 6900 pour les décès dans les Ehpad. Dans les deux cas, une grande majorité des décès supplémentaires concernent des plus de 80 ans. On admettra ci-dessous qu’ils le sont tous.
Le tableau ci-dessous donne:
> le taux de mortalité COVID par tranche d’âge à partir des hypothèses ci-dessus (en %),
> le taux de mortalité annuel en France,
> l’effet de l’épidémie si tous le monde était contaminé, en comparaison de la mortalité annuelle.
Tranche d’âge | Taux Covid | Taux annuel | Effet Covid |
0-40 ans | 0,01 | 0,04 | 1 ,25 |
40-50 | 0,09 | 0,17 | 1,5 |
50-60 | 0,3 | 0,42 | 1,7 |
60-70 | 0,8 | 0,92 | 1,85 |
70-80 | 2 | 1,83 | 2,1 |
80 et plus | 16 | 5,8 | 3,7 |
90 et plus | 18,3 |
Lecture : si tout le monde avait été contaminé par la Covid 19 en 2020, la mortalité des 70/80 aurait été multipliée par 2,1, celle des moins de 40 ans par 1,25.
En guise de conclusion
Fallait il porter de tels coups à l’économie pour éviter une telle surmortalité, et faut il continuer à imposer des contraintes à la population dans cet objectif ?
Chacun pourra tenter de donner sa propre réponse à ces questions difficiles.
La réalité est que les mesures prises n’ont pas été assez draconiennes pour arrêter complétement la circulation du virus comme l’a fait la Chine. L’objectif est d’éviter que le système de santé soit débordé (et on n’en était pas loin en avril en IdF).
Avec un système de santé débordé, on ne soigne plus les personnes ayant d’autres affections. Et on ne sauve plus de la Covid les 85 % qui sortent guéris aujourd’hui. Autrement dit, il faudrait multiplier les taux de mortalité par 6. Cela donne à réfléchir.