La fission de 1 gramme d’uranium 235 produit autant de chaleur que la combustion de 1,6 tonne de fuel ou de 2,8 tonnes de charbon. L’énergie libérable par l’uranium est extrêmement concentrée, parce qu’elle résulte d’une transformation de l’atome (fission) et non d’une transformation chimique. Cette caractéristique a de nombreuses conséquences sur l’impact des productions d’électricité selon les phénomènes utilisés.
Il faut cependant rappeler que le combustible utilisé dans les réacteurs nucléaires ne contient qu’un peu plus de 2% d’uranium 235, le reste étant de l’uranium 238, non fissile. Le rapport de masse entre le combustible introduit dans une centrale à charbon ou à gaz et celui d’un réacteur nucléaire n’est donc pas de 1 000 000 à 1, mais plutôt de 10 000 à 1. Ce qui reste encore énorme !
Cela a des conséquences sur la place occupée par les outils de production, sur les volumes de stocks de produits ou sur les volumes de déchets.
Les outils de production
Sur les outils de production, il n’y a pas de grande différence entre une centrale à charbon et un réacteur nucléaire. Certes, la centrale va voir passer un volume considérable de charbon dans une seule journée, mais justement, il ne fait que passer !
Si on compare le nucléaire et l’éolien, on a pu calculer qu’à production égale, le premier consomme environ 10 fois moins de béton et d’acier. L’emprise au sol de l’éolien est nettement plus importante, et c’est encore plus vrai pour le solaire (d’où le conseil de l’installer sur les toits).
La toute neuve centrale de charbon de Dattelsn4, consomme environ 3 millions de tonnes de charbon, à comparer aux 100 tonnes de combustibles présents pour 4 ans dans un réacteur nucléaire de puissance comparable.
Les stocks
La France possède une capacité de stockage de gaz naturel de 11,7 milliards de mètres cubes (imaginez un cube de 2500 mètres de côté), à comparer à une consommation annuelle d’environ 40 milliards de mètres cubes. Ces stocks qui représentent 30 % de la consommation annuelle sont indispensables pour faire face à une consommation extrêmement saisonnière : celle-ci est 5 fois plus élevée l’hiver que l’été.
La loi française oblige les pétroliers à conserver un stock dit stratégique de carburant (30% de la consommation annuelle, qui est de 40 millions de tonnes environ, hors carburant avion). Celui-ci est dispersé sur environ 280 lieux de stockage sur toute la France.
EDF possède un stock d’uranium correspondant à 2 ans de production électrique. Il existe aussi un stock d’uranium appauvri qui permettrait, si besoin, de faire face à 5 ans de consommation. La France importe chaque année environ 8000 tonnes d’uranium qui donnent environ 1000 tonnes d’uranium enrichi et 7000 tonnes d’uranium appauvri. Ces 1000 tonnes correspondent à environ 50 m3, soit l’équivalent d’un cube de moins de 4 mètres de côté.
Les déchets
Les principaux déchets de la combustion des hydrocarbures, vapeur d’eau et CO2, sont dispersés dans l’atmosphère, avec les conséquences que l’on connaît. La France émet plus de 400 millions de tonnes de CO2 par an. Il y a bien sûr d’autres déchets, notamment soufrés et nitrés, que l’on retrouve aussi dans l’atmosphère. En 1990, la combustion dans les transports rejetait encore environ 4000 tonnes de plomb par an. Ce volume a beaucoup diminué avec la suppression des additifs en plomb dans l’essence : elle n’est plus que de 60 tonnes par an.
Le cas du charbon est un peu différent, puisqu’au-delà des émissions de gaz, il reste des déchets solides (cendres). La combustion des 3 millions de tonnes de Dattels4 donne probablement de l’ordre du million de tonnes de cendres. Ces cendres sont aujourd’hui principalement utilisées pour remblayer les mines à ciel ouvert, mais on connaît les terrils dans les anciens bassins miniers.
Qu’en est-il du nucléaire ?
L’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) tient à jour une comptabilité rigoureuse des stocks de déchets radioactifs. A fin 2019, il y avait environ 1 670 000 m3(un cube de 120 mètres de côté) de déchets radioactifs de toutes natures. Ces déchets sont classés à partir de deux critères : leur activité plus ou moins forte et leur durée de vie.
Les déchets de haute activité (HA)et les déchets de moyenne activité à vie longue (MA-VL) représentent respectivement 94,9% et 4,9 % de la radioactivité. Ils sont destinés à être entreposés en profondeur (projet Cigeo). Notons que les déchets HA représentent un volume correspondant à un cube de 16 mètres de coté
Comme on le voit, le caractère très concentré de l’énergie nucléaire a des avantages pratiques évidents : moins de surface au sol occupée, moins de matériaux pour construire, possibilité d’avoir beaucoup plus de stocks de combustible, volume de déchets faible…
La puissance de la fission nucléaire a eu une contrepartie historique : la bombe d’Hiroshima ne contenait que 64 kg d’uranium (235), mais sa puissance était équivalente à celle de 22.000 tonnes de dynamite.
Le nucléaire civil n’utilise pas un uranium enrichi à 100 % comme le nucléaire militaire. Mais l’utilisation de ce combustible demande des précautions extrêmement importantes du fait de sa radioactivité. C’est un sujet que nous traiterons dans un prochain article sur ce thème.
[…] Une énergie concentrée […]