Un article récent pose la question de la limite entre liberté de la recherche et appréciation des innovations comme les biotechnologies, la 5G et bien d’autres. L’argumentation rappelle principalement les interdits qu’ont subi les scientifiques quand leurs découvertes remettaient en cause la vision dominante (et imposée) de la nature. Les exemples de Copernic et de Galilée sont cités. Mais comme l’intention de l’auteur est d’interroger le refus de technologies, il me semble (très modestement) que le problème s’énonce en d’autres termes.
Les révolutions scientifiques comme celle de la rotation de la terre autour du soleil bouleversent les représentations que nous avons du monde. Elles n’ont pas en général de conséquence immédiate, sauf celle de s’opposer au dogme ambiant. Le débat engagé, ou l’interdit pur et simple, était d’ordre religieux. Un parallèle avec l’actualité serait à chercher dans la théorie de l’évolution de Darwin, contre laquelle les fondamentalistes s’insurgent au motif de la contradiction avec leur lecture de leur texte de référence. On est, comme l’indique l’article, dans le débat « philosophique » ou disons plutôt théorique (même si la mise à mort peut en être l’issue). On le constate tous les jours, on n’en est pas sorti.
Mais le refus de la 5G, pour prendre cet exemple, obéit à une autre logique. Ce n’est pas dogme contre science. On est dans l’impact, dans la précaution, la demande de garantie, de vérifications… D’une certaine façon, on est technique contre technique, mesures et contre-mesures, puis contre-contre-mesures. L’idée des opposants à la nouvelle génération de téléphonie est plutôt dans la protection de l’espèce, la considération que le progrès est devenu cancérigène et que le haut-débit n’a d’usage que pornographique (si l’on en croit le maire de Grenoble).
Les objections à ces accusations peuvent être de plusieurs ordres: d’innombrables études ont été menées dans le monde entier sans démontrer de nocivité; de nouvelles applications sont en perspective et porteuses de valeur. Mais aucune ne relève ni d’une vérité supérieure ni d’une découverte. C’est une confiance contre une défiance, il en va souvent ainsi. Car nous avons besoin de nous projeter dans l’avenir pour prendre des décisions, d’anticiper les possibles conséquences?
En ce sens, le questionnement de J-D Bour sur la science et la conscience s’applique aussi aux enjeux technologiques. De nombreux accusateurs de la 5G sont de ceux qui saluent la procréation technique. Il y a un mauvais progrès et un bon progrès. La différence entre les deux, c’est justement la conscience que l’on se fait dudit progrès. Et cette conscience est bien difficile à justifier. On est dans les choix de vie.