Cette épidémie de Covid épuise nos patiences. Tout le monde attend la fin du tunnel, celle que le Premier ministre lui a fait miroiter, sans vraiment préciser l’échéance. Mais rien ne nous empêche de chercher à éclairer l’avenir !
Les vaccinations
Le gouvernement a décidé de vacciner en premier les plus fragiles et le personnel soignant, soit 10 millions de personnes, dont un peu plus de la moitié sont des plus de 75 ans. Plus de la moitié de ces derniers ont déjà reçu une première dose.
La simulation ci-dessous s’appuie sur la situation au 22 mars, avec une hypothèse de livraison de 10 millions de doses par mois (12 en juin) et ne tient pas compte d’éventuelles livraisons du vaccin de Johnson et Johnson. On fait l’hypothèse qu’au maximum 80% de la tranche d’âge est vaccinée (résultat observé dans les Ehpad), les 20 % restants correspondants aux personnes ayant des contre-indications, refusant le vaccin ou ayant déjà eu le Covid récemment. En fonction des paramètres connus, une simulation de l’évolution de la protection en fonction de l’âge donne le tableau suivant.
| Classe d’âge | Effectifs en millions | % protégés au 1/04 | % protégés au 1/05 | % protégés au 1/06 | % protégés au 1/07 |
|---|---|---|---|---|---|
| + 75 ans | 6,2 | 50 | 80 | 80 | 80 |
| 65/74 | 7,2 | 15 | 46 | 80 | 80 |
| 50/64 | 12,5 | 11 | 17 | 33 | 80 |
| 30/49 | 16,3 | 3,5 | 4 | 6 | 14 |
Impact sur la circulation du virus
Sur 207 147 personnes testées positives dans la semaine du 14 au 20 mars, 17 172 ont plus de 70 ans et 53 074 plus de 50 ans, soit respectivement 8,3% et 25,6 % du total des personnes positives. Même si on admet que les personnes vaccinées ne transmettent pas le virus (ce qui est très probable, mais pas certain), la vaccination des plus de 50 ans n’aura guère d’effet sur la circulation du virus. Seule la vaccination des 20/49 ans aura un réel effet (s’ils acceptent de se vacciner en nombre suffisant) : la vaccination n’aura donc d’effet réel sur la circulation du virus que vers la fin de l’été !
Impact sur la mortalité
On l’a su très vite, la mortalité est très dépendante de l’âge et les données issues de l’Imperial College de Londres illustrent bien la situation que nous connaissons.
| Tranche d’âge | 75 et + | 65 ->74 | 50->64 | 30->49 | 0->29 |
|---|---|---|---|---|---|
| Taux de mortalité | 7% | 1,9% | 0,64% | 0,14% | 0,02% |
Si les contaminations sont uniformes sur les 42 millions de plus de 30 ans, le taux de mortalité moyen est de 1,6 % environ. Elle n’est que de 0,67 % pour les 30/74 ans, et de 0,35 % pour les 30/64 ans.
On le comprend, la mortalité devrait nettement baisser avec les vaccinations, à incidence totale constante. Cette baisse devrait se constater à court terme et être manifeste dès la fin avril, pour continuer ensuite. Une question demeure : qu’en sera-t-il pour la minorité de personnes âgées qui ne seront pas vaccinées ?
Impact sur les hôpitaux
Les statistiques compilées par Covid Tracker nous donnent le nombre de personnes hospitalisées Covid, par tranche d’âges, début mars et au 24 mars, en milliers :
| 0-19 | 20-29 | 30-39 | 40-49 | 50-59 | 60-69 | 70-79 | 80-89 | 90et+ | |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| 01/03 | 0,1 | 0,2 | 0,4 | 0,9 | 2,1 | 4 | 6 | 8 | 3,5 |
| 24/03 | 0,1 | 0,3 | 0,6 | 1,2 | 2,8 | 4,8 | 6,3 | 7 | 3 |
Les moins de 50 ans ne représentent que moins de 10 % des hospitalisations, bien que leur nombre ait notablement augmenté depuis le début du mois. Les plus de 80 ans sont moins nombreux, du fait des vaccinations en cours, et leur part passe de 46 à 38 % d’un total qui a augmenté d’un millier de patients. Fin mai, quand les plus de 75 ans auront été vaccinés, ainsi qu’une moitié des 65/74 ans, la pression sur l’hôpital devrait avoir fortement diminué (au moins du côté des entrées), a fortiori fin juin. Sauf s’il y a beaucoup de refus de vaccination.
La situation en réanimation est un peu différente, puisqu’on n’y trouve que peu les plus âgés, ceux en train d’être vaccinés. Mais le mouvement sera le même avec toutefois environ un mois de décalage.
Quelle circulation du virus ?
Le virus circule à un niveau très élevé : si l’on tient compte des asymptomatiques non testés, il y a probablement 1% de la population francilienne qui est contaminée chaque semaine actuellement.
Plusieurs inconnues demeurent : quelle proportion de français accepteront de se faire vacciner ? Quelle proportion attendra d’être vaccinée avant de baisser la garde dans les comportements sociaux ? Les mesures prises récemment seront-elles efficaces ? le gouvernement en prendra t-il d’autres ?
On peut ainsi envisager quatre suites des événements, parmi d’autres.
- Le niveau de circulation du virus reste très élevé, avec progressivement un remplacement de cas chez les jeunes et une diminution chez les plus âgés. Une immunité collective se construit au bout de quelques mois, par le cumul des vaccinations et des anciens malades. Entre-temps, on a accumulé les décès, les Covid longs.
- Le niveau de circulation du virus baisse clairement du fait des mesures gouvernementales, de l’amélioration de la météo et des vaccinations. Le virus continue à circuler longtemps, tant que l’immunité collective n’est pas acquise et touche les seuls non-vaccinés. Si les Français se vaccinent en masse, ils sont nombreux à échapper au Covid et à ses conséquences.
- La vaccination réduit drastiquement la pression sur les hôpitaux au début de l’été et il existe une forte pression pour lever les restrictions. Les comportements induits provoquent une flambée de malades chez les jeunes (dont certains sont hospitalisés, voire décèdent), mais celle-ci dure assez peu (2 ou 3 mois ?)
- De nouveaux variants apparaissent qui échappent aux vaccins ou à certains d’entre eux, et on repart pour un tour…
Il est difficile de faire des pronostics entre ces scénarios, mais il me semble que le 3 soit le plus probable. On peut le craindre du moins.