L’intervention de Liliane Wietzerbin, élue issue du collectif Sceaux en commun, lors du Conseil municipal du 15 octobre aux Blagis nous avait donné envie d’en savoir plus. Elle avait évoqué un manque de vision de l’équipe municipale et nous nous étions demandé : qu’appelle-t-elle une vision ?
Le maire avait décliné ses intentions de deux façons. L’une, assez globale, évoquait une volonté de redynamiser le quartier des Blagis, d’en améliorer la sécurité, les transports, l’attractivité à travers des rénovations, le maintien et le développement de services publics, la qualité scolaire et l’offre culturelle. D’un autre côté, il avait dressé une liste de toutes les actions en cours ou à venir. Sceaux Mag de novembre en rapporte la substance.
Comme ni les principes généraux ni la liste des actions et décisions concrètes ne satisfaisaient Liliane Wietzerbin, nous l’avons interrogée sur « sa vision de la vision ».
Avant-propos
Elle revient en préalable sur les « Parlons ensemble » qui lui ont semblé une opportunité manquée. La démarche n’a pas structuré l’expression des attentes, ne les a pas confrontées. Il n’en est pas sorti un diagnostic partageable et partagé. De nombreuses actions étaient déjà engagées et si certaines comme l’ouverture d’une agence France services lui semblent d’excellentes initiatives, c’est un ensemble plus ambitieux qu’il conviendrait de développer. Elle y reviendra.
Surtout, c’est un point de départ qu’il aurait fallu définir ; un bilan de l’état présent qui serve de référence, avec une photographie précise de la sociologie du quartier, du turn-over parmi les résidents des HLM, de la dynamique des commerces, d’une description des problèmes de sécurité qui s’appuie sur des statistiques plus précises que les on-dit, sur les impacts réels des caméras, pour ne citer que ces exemples. Une vision est une trajectoire par rapport à un existant qui doit avoir été correctement identifié.
Mais sur quel périmètre faut-il raisonner ? Quand certains parlent des Blagis, ils pensent aux Bas-Coudrais, d’autres incluent les Musiciens et toute la partie qui va jusqu’à la voie ferrée et d’autres encore incorporent des portions des 4 communes. La question reste en suspens.
Cela dit, elle a retenu des interventions le poids important des incivilités, des pelouses mal entretenues, des jeunes qu’elle estime laissés sans soutien et, inversement, un attachement au quartier, le souhait d’événements festifs, une demande d’une mixité sociale qu’elle situe à trois niveaux : en interne aux Blagis, avec le centre de Sceaux, avec les communes voisines. Autant de données pour le diagnostic.
Une ambition et un terme
C’est une double approche qui la conduit à voir une vision comme une ambition couplée à une temporalité. Elle imagine à 10 ans, l’horizon le plus lointain sur lequel il est nécessaire de travailler dès aujourd’hui ; à 5 ans, comme jalon de mi-parcours qui permet de suivre les avancées et les impasses ; à court terme.
A 10 ans, elle voit « un autre cœur de villes ». Elle souligne l’intention dans ces villes au pluriel. Le quartier s’inscrit dans un espace associant FAR, Bagneux et BLR. Si chacune des communes a son propre agenda et si le but n’est pas de construire une hypothétique (et chimérique) intercommunalité, ce nouvel espace est un lieu cohérent . Il cohabite sans le dupliquer avec le centre-ville de Sceaux. Il partage avec le centre d’être un lieu où on a envie d’être, de faire ses courses, de se promener. « Pourquoi ne pas engager dès à présent une réflexion sur une restructuration de l’espace autour du centre commercial, l’intérêt d’une ouverture vers les rues qui le jouxtent (avenue Jean Perrin ou rue du docteur Roux)…. ? »
Elle évoque, en guise de référence, la commune libre des Blagis, cette association qui symbolisa dans l’après-guerre un besoin de s’amuser ensemble, de se détendre. Elle voit le festif comme un premier pas possible. Elle a cependant bien conscience que l’entente de quatre communes sur la valorisation d’un quartier commun serait bien difficile à atteindre.
A 5 ans, ce sont des transports refondés avec des voies cyclables le long de l’avenue Jean Perrin (qu’elle intègre dans le projet RER Vélo d’associations franciliennes), des bus intégrant le quartier et le centre, des voies piétonnes. Par quoi remplacer le Paladin se demande-t-elle ? Pour avancer aussitôt que les 4 communes sont également concernées par la question.
Une condition nécessaire
Toute vision, pour elle, doit aussi venir du bas. Elle ne peut être que coconstruite. Un comité citoyen serait en charge d’en suivre les propositions. Si l’on souligne le fait que seule une minorité très engagée, très militante, s’exprime dans les réunions d’habitants, quelles qu’elles soient, elle accepte le constat, mais l’oppose au fourmillement d’idées qu’elle imagine éclore de la rencontre des énergies. Sa confiance en la créativité collective semble immense. C’est de la démocratie participative qu’elle voit émerger la plus-value citoyenne. Faire adhérer, embarquer les gens dans une « histoire » qui les motive impose de les associer à la conception et à la matérialisation de la feuille de route.
Des actions immédiates
A court terme, elle invoque volontiers tout un réservoir d’idées à élaborer avec la population. Elle pense pêle-mêle à une salle des fêtes, une ressourcerie, un point Croix-Rouge, une épicerie solidaire, un espace de coworking, pour en rester à ces exemples. Elle est convaincue que les idées fourmillent et que le Budget participatif pourrait être un formidable outil pour les concrétiser, à condition que le montant alloué soit plus important et ses thématiques plus variées.
Elle situe les espaces verts parmi les enjeux déterminants : restructurer le parc des Bas-Coudrais accueillant de nouveaux usages ; étendre les interventions du CSCB ; Elle revient sur le parc des Bas-Coudrais qui lui tient à cœur : un très beau lieu avec des arbres magnifiques et sa large pelouse. La charge de l’entretien est un vrai sujet. Elle connaît et peut comprendre la position de certains locataires qui voudraient fermer, privatiser la résidence au motif qu’ils paient l’entretien du parc. Mais elle suggère plutôt que ce coût soit repris par la commune dans le cadre de contrats avec les bailleurs. Ceci recentrerait les responsabilités de l’OPHLM vers la maintenance et les rénovations de l’habitat et celles de la ville vers la gestion des espaces verts.
Le thème de la discrimination apparaît à quelques reprises. Le centre est privilégié, les Blagis sont négligés. Une bourse récompense-t-elle des jeunes gens portant un projet humanitaire à l’international ? Pourquoi, dit-elle, n’y a-t-il rien pour les jeunes qui ont des projets différents, peut-être plus en proximité et tout aussi intéressants ? Un autre exemple : la place Charles de Gaulle qui fait l’objet d’un projet. Qu’on le soutienne ou pas, en partie ou en totalité, son impact sur le centre serait indéniable. Cette taille lui semble être celle d’un projet pour les Blagis.
Elle a entendu les doléances au sujet des incivilités. Elle répond médiateurs sociaux, prévention, rôle de l’école et « donner du sens ». L’expression pourrait sans doute faire l’objet d’une explication de texte particulière. Elle souligne ensuite les points forts du quartier : ses qualités architecturales, sa jeunesse et son histoire.
Réussite possible donc, initiatives qu’elle voit nombreuses dès lors que des budgets y sont associés. Les budgets participatifs devraient augmenter, des investissements ambitieux devraient être lancés. Par la volonté d’allouer des budgets aux projets qui font sens, elle voit le moyen d’adresser un signe aux habitants : votre implication servira à quelque chose.