Vous avez peut-être entraperçu une ruine lors d’une balade dans un des bois du Plessis-Robinson. Il s’agit du Château de la Solitude. Son nom provient du nom du bois éponyme où il se trouve. Voici en quelques lignes plus de 400 ans d’histoire du site.
Une première présence au début du XVIIe siècle
Tout commence en 1613, le Bois de la Solitude, comme le Bois de la Garenne tout proche, appartiennent à l’ordre religieux des Feuillants qui y construit un monastère. Ces réserves forestières et de gibier sont saisies en 1881 par l’Etat. Jean-Baptiste Toulet en achète une parcelle et y construit la Villa Toulet, composée de deux propriétés, d’un jardin paysager « accidenté » orné de bassins, de grands arbres et de fabriques, de deux chalets, d’une serre hollandaise et enfin d’une maison de jardinier.
« Le Château du Chocolat »
Le terrain est acquis en 1898 par Marie-Philiberte Marquis (1859 -1912), petite-fille d’un riche chocolatier parisien, François Marquis (1785-1857) qui ouvre en 1818 sa première boutique parisienne, 59 Passage des Panoramas. La Maison François Marquis rencontre un tel succès qu’elle devient « Première marque du Monde » et ne compte pas moins de huit adresses dans la Capitale et une succursale à Vichy.
Héritière d’un petit empire, sa descendante, Marie-Philiberte Marquis rêve d’une luxueuse demeure. Elle commence par faire raser le bâti existant et y ajoute une nouvelle parcelle permettant la construction d’une imposante maison bourgeoise, confiée en 1903 à un jeune architecte, ancien élève de Viollet-le-Duc. Le plan s’articule autour d’une cour carrée. Les ornements, les fenêtres à ogives et des sculptures, dispersées dans le parc confèrent au château un style néogothique. Il s’agit d’épater le visiteur ! Ainsi, durant une dizaine d’années, le château verra défiler le Tout-Paris des arts et de la finance. C’est la période la plus fastueuse de ce lieu, évoqué par Raymond Radiguet dans son roman Le bal du Comte d’Orgel, publié bien après la mort de la châtelaine, en 1924.
La Première Guerre mondiale met fin aux fastes
Pendant la période de la Première Guerre mondiale, le domaine est vendu. Il devient propriété de Victor Taunay (1852-1926), à l’origine de la création du statut de journaliste professionnel en France. Il transforme la demeure en maison de repos. L’homme politique socialiste et ancien président du Conseil, René Viviani (1863-1925) y finira ses jours.
En 1936, la propriété est cédée et devient, un an plus tard, la résidence d’une congrégation de Carmélites venue de Nogent-sur-Marne. Le Carmel résidera dans le château jusqu’en 1956.
Après le départ des sœurs, le ministère de l’Éducation nationale y installe en 1971 un collège d’enseignement technique féminin, couplé à un foyer d’accueil et de formation des jeunes mères célibataires. Le lieu inspirera à la comédienne de « Sous le soleil », Bénédicte Delmas, son premier téléfilm Elles…Les filles du Plessis, diffusé sur France 3 en mars 2016. Elle y dénonce la condition des mineures enceintes dans les années 70. Sandrine Bonnaire y interprète le rôle de la directrice du foyer. En 1976, le foyer est délocalisé et le château est laissé à l’abandon.
Le début de la fin …
Les pilleurs et les rôdeurs dépouillent le château jusqu’à en faire un squat. Deux incendies se déclarent consécutivement, en 1977 et 1978, détruisant les toitures et la quasi-totalité de son intérieur. Seuls les murs porteurs et la structure en métal restent en place.
En 1978, la municipalité, inquiète de la possible vente aux enchères du Domaine de la Solitude, fait classer la zone, pour éviter tout projet immobilier dans le domaine. En 1992, la municipalité entreprend des aménagements autour du domaine et décide de transformer le parc du château en espace public sur 2,3 hectares.
Aujourd’hui l’édifice est interdit d’accès pour risques d’éboulements, une haute clôture le sépare du reste du parc. Sa disparition est malheureusement inéluctable d’ici les prochaines années. Alors n’hésitez pas à admirer sa silhouette fantomatique avant qu’il soit trop tard.


En savoir plus
Un petit film d’Ubex Connection pour découvrir les vestiges du château : https://youtu.be/EFunGFiqBJk