L’augmentation très significative de l’usage du vélo et les appels à la marche en ville, souhaitables en ce qu’ils visent à améliorer la santé et la qualité de l’environnement, produisent néanmoins des situations conflictuelles.
Les vélos ont mué, intégrant des technologies nouvelles – vélos électriques, trottinettes motorisées – transformant leur nature même. Ils ne sont plus de simples passeurs de paysages, mais des acteurs économiques, professionnels, rapides.
Vulnérables, les piétons subissent un sentiment croissant d’insécurité. Les personnes âgées, particulièrement, se retirent de l’espace public, victimes silencieuses d’une mobilité agressive. Des études ouvrent sur d’intéressantes réflexions.
Des situations conflictuelles
Celle (passionnante) de Rue de l’Avenir présente parmi les causes de situations conflictuelles : des espaces partagés sans réglementation claire, comme les trottoirs et les voies vertes en milieu urbain dense. Également, une mauvaise compréhension des aménagements : les doubles sens cyclables et autres dispositifs sont mal compris et parfois mal utilisés, créant des tensions.
Le terme « mobilités actives », souvent utilisé pour promouvoir des formes de transport sans émission de CO2, pose problème. Il regroupe des usagers très différents. Les vélos ont progressivement intégré des engins de plus en plus motorisés (VAE, trottinettes, cyclomobiles), transformant leur usage initial. Dans les aires piétonnes, leur présence devient problématique.
Encadrer les usages
L’étude de Rue de l’Avenir propose des évolutions et en situe quatre types d’acteurs : le pouvoir réglementaire qui doit réguler ; les collectivités pour améliorer la concertation ; les associations de cyclistes et les associations de piétons pour chercher des compris et ne pas se diaboliser.
On se reportera au texte pour avoir une vue complète de la démarche et mieux la situer. Ce résumé ici ne vise qu’à susciter la curiosité.
Il s’agirait donc d’adapter les règles pour mieux encadrer les nouveaux usages de l’espace public, comme les engins de déplacements motorisés électriques (EDPM)[1] et les vélos cargos. Il s’agirait aussi de revoir les règles pour mieux encadrer les usages et sanctionner les comportements dangereux.
Elle propose en matière d’aménagement de l’espace public d’assurer la lisibilité et la continuité des aménagements. Ce qui revient de fait à réduire la vitesse et le nombre de véhicules, et délimiter clairement les espaces pour chaque mode de transport.
Du côté des comportements, elle invite à promouvoir la vigilance et la tolérance entre usagers, et accompagner les changements de comportement sur le long terme. En d’autres termes : former et sensibiliser tous les usagers, à tout âge, pour une cohabitation apaisée.
Besoin d’évolutions réglementaires
L’étude de Rue de l’Avenir présente quelques propositions. Pour les aires piétonnes : autoriser les cyclistes à circuler sur les aires piétonnes sous conditions (allure du pas, non-gêne des piétons).
Pour la traversée conditionnelle : aligner la réglementation piétonne sur la pratique réelle ; permettre la traversée de rue sous certaines conditions.
Double-sens cyclables : généraliser les double-sens pour améliorer la sécurité ; habituer les usagers à surveiller la circulation dans les deux sens.
Réduction de vitesse en zones de rencontre : limiter la vitesse à 10 km/h au lieu de 20 km/h ; améliorer la priorité piétonne et la sécurité.
Échelle de vitesses proposée : aire piétonne à 5 km/h ; zone de rencontre à 10 km/h ; zone 30 à 30 km/h.
Traversée des voies express vélo : limiter la vitesse dans les zones piétonnes denses ; trouver des itinéraires alternatifs ; dissuader les cyclistes rapides aux heures de forte affluence.
Le point de vue des cyclistes
Si elles en parlent peu sur leurs sites, les associations de cyclistes sont généralement conscientes des risques que la pratique du vélo peut représenter pour les piétons. Dans les zones urbaines denses, les espaces partagés, comme les trottoirs ou les voies vertes, sont souvent trop étroits. Elles reconnaissent que les vitesses des cyclistes, surtout dans des zones très fréquentées, peuvent être dangereuses pour les piétons, notamment lorsqu’un cycliste roule à une vitesse élevée.
En guise de réponse, les associations plaident souvent pour des aménagements spécialisés. En revendiquant des pistes cyclables séparées des trottoirs, elles revendiquent de fait une réduction (ou une complication) de la circulation des voitures.
Elles estiment aussi que les règles de circulation doivent être claires et mieux appliquées, avec une meilleure communication sur les aménagements urbains. On trouve des déclarations intéressantes sur le site de la Fédération des Usagers de la Bicyclette (FUB).
Le rôle des transports publics
60 Millions de Piétons et la FNAUT (Fédération Nationale des Associations d’Usagers des Transports) ont sollicité le Cerema[2] pour approfondir le lien entre la marche à pied et les transports publics. Ils mettent en avant l’importance de la « marche intermodale », qui désigne les déplacements à pied entre différents modes de transport.
L’étude du Cerema doit identifier les difficultés qui entravent la continuité entre ces deux modes de déplacement : la marche et les transports en commun. Également les interférences avec les autres mobilités individuelles dans ces espaces : voiture, taxi, motos, vélo et EDPM. On attend impatiemment les résultats qui sont pour le printemps.
[1] EPDM: véhicule électrique sans place assise pour une seule personne et sans aménagement destiné au transport de marchandises.
[2] Le Cerema est un établissement public qui accompagne l’État et les collectivités territoriales pour l’élaboration, le déploiement et l’évaluation de politiques publiques d’aménagement et de transport.