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Parler des attentats de 2015 aux lycéens de Marie-Curie

Ce lundi 27 mars 2023, la présentation du livre Juger le V-13, Une réponse démocratique à la barbarie (Éditions de La Martinière) réunissait plus d’une centaine d’élèves de terminale et leurs professeurs.

À l’initiative de Patricia Doukhan, professeure de philosophie, d’éducation morale et civique, de droit et grands enjeux du monde contemporain, Noëlle Herrenschmidt et l’un des coauteurs de ce livre, Arthur Dénouveaux, ont fait le commentaire illustré du procès qui s’est tenu au Palais de justice de Paris de septembre 2022 à juin 2023.

Procès hors normes comme ils l’ont rappelé, par sa durée, les faits et le nombre de victimes, le nombre de parties civiles et de leurs avocats, les dimensions du dossier d’instruction et des lieux.

Juger le V13 – Une réponse démocratique à la barbarie

Étaient présents Étienne Recoing, proviseur de la Cité scolaire Marie-Curie, Patricia Doukhan et ses collègues Ludovic Sot et Pascale Lebrun professeurs des classes présentes, auxquels se sont jointes d’autres professeures Solange Rameix, Hélène Donatello et Elisa Leblanc. Cette présentation fut un émouvant et passionnant échange sur le déroulement du procès qui a jugé les terroristes encore vivants et leurs complices, auteurs des attentats qui se sont déroulés le vendredi 13 novembre 2015 à Paris, au Stade de France, au Bataclan et sur les terrasses des cafés La Belle Équipe, Le Carillon, Le Petit Cambodge, La Bonne Bière et La Fontaine au Roi.

Deux grands témoins

Accompagnant la projection d’images choisies pour montrer les lieux, les acteurs et les moments forts de ce procès, Noëlle Herrenschmidt et Arthur Dénouveaux, auteurs de ce livre, ont fait vivre deux points de vue.

Noëlle Herrenschmidt, dessinatrice d’audience, aquarelliste-reporter – comme elle tient à le rappeler – expliquait comment le dessin, l’aquarelle et les commentaires pris sur le vif montrent ce qu’elle voit et racontent les émotions qu’elle perçoit. « Ce qui m’a frappée, c’est que ce procès est un procès de jeunes. J’ai couvert les procès contre l’humanité de Barbie et de Papon. Au moment de ces procès, les faits étaient déjà anciens, plus de trente ans. Les victimes racontaient leur passé. Le V13, tout le monde était jeune. Les victimes, les accusés, les avocats. 30 ans à peine ! »

Arthur Dénouveaux est un témoin très particulier. Il était présent au Bataclan lors de l’attentat. L’expérience qu’il y a vécue l’a amené à créer l’association Life for Paris, qui a permis aux victimes d’échanger leurs témoignages et de se soutenir tout au long d’une instruction longue et éprouvante. C’est au cours de celle-ci qu’il a rencontré Antoine Garapon, magistrat scéen et coauteur du livre auquel il a apporté la dimension juridique et la réflexion de philosophie politique à l’origine du sous-titre Une réponse démocratique à la barbarie.

Les commentaires d’Arthur Dénouveaux sur les étapes de ce procès, sur les rôles de ses différents acteurs, sur les positions prises par les accusés étaient tout à la fois d’une grande clarté et d’une simplicité nette, qualités précieuses devant une assistance de lycéens.

Un dialogue de vie

À mesure que les images projetées défilent, les deux auteurs les commentent, construisant un dialogue très vivant, parfois passionné, pour parler d’une histoire personnelle qui, par le jeu de la confrontation, devient universelle. Les élèves sont pris. L’atmosphère devient presque recueillie.

Vient le moment des questions. Elles sont nombreuses et précises, mais toujours empreintes de retenue et de pudeur. Elles portent, pour l’essentiel, sur le vécu de Noëlle Herrenschmidt et d’Arthur Dénouveaux. Comment peut-on écouter ces témoignages terribles et les dessiner en même temps ? Quel regard porter sur les accusés ? Et les victimes, comment ont-elles vécu le procès ? Puis son dénouement ? Comment continuer à vivre et se reconstruire ?

L’aquarelliste explique comment elle a organisé sa vie pour être présente tous les jours. Comment montrer l’attention qu’elle porte à tous ceux qui sont présents au procès sans en être les acteurs principaux. Les gendarmes, les pompiers, les aides psychologiques, les « gilets roses », les services de sécurité, les techniciens de la régie, lui permettent de garder un pied dans la réalité de la vie quotidienne. « Je suis restée dans le procès pendant les 8 mois ».

De son côté, la victime se raconte. Très direct. Très simple. Pourquoi il n’a pas besoin de pardonner. Comment il a abandonné tout esprit de vengeance. Comment il gère le traumatisme. L’importance de l’aide psychologique, de la parole, du partage de la peine et donc le rôle de l’association. Savoir que rien n’est jamais oublié. Pas d’obsessions, mais des microstratégies d’évitement. « L’odeur de poudre m’est insupportable… Pas de feux d’artifice le 14 juillet ! »

Il ajoute: « Il faut en parler et pouvoir en parler. »

Transmettre une expérience

Quentin Allemand

Les applaudissements libèrent d’une tension forte. Les yeux des lycéens brillent. On peut y lire de la reconnaissance. Ils quittent l’auditorium parlant ce qu’ils viennent d’entendre et de voir. Quelques-uns viennent continuer à poser des questions aux auteurs. L’un deux, Quentin Allemand élève de Terminale, vient montrer à Noëlle Herrenschmidt des croquis des deux conférenciers. « Formidable, ils sont excellents ! s’exclame-t-elle. Est-ce que je peux les photographier ?».

« Je suis ravie de cette rencontre, conclut-elle. C’est exactement ce que je veux faire : partager des expériences qui donnent du sens à nos vies. »


A consulter:
https://www.editionsdelamartiniere.fr/livres/juger-le-13-novembre/
http://lifeforparis.org/

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