La secrétaire nationale d’EELV, Marine Tondelier, a soutenu la manifestation contre les bassines à Sainte Soline, malgré son interdiction et la volonté de certains organisateurs de casser. Quelle conception de la démocratie cela traduit-il ?
Les Verts sont très attachés à la démocratie, y compris dans leur propre organisation. Ils réclament souvent plus de participation citoyenne. Leur soutien à l’Union européenne les démarque radicalement de courants plus populistes comme la France insoumise. Localement, ils sont souvent promoteurs d’une vie associative riche.
Dans le même temps, ils n’hésitent pas à soutenir des actions illégales quand ils estiment qu’il s’agit de protéger l’environnement. On l’a vu avec les faucheurs de maïs OGM, à Notre Dame des Landes ou dans d’autres actions.
Présence à Sainte Soline
On vient encore de le voir dans les deux Sèvres, avec une manifestation contre les bassines. L’une des associations organisatrices, Les soulèvements de la terre, explique sur son site « Seul un basculement radical – un soulèvement – pourrait permettre d’enrayer le réchauffement climatique ». Après la manifestation, ils se félicitent « les manifestant-e-s ont excavé et désarmé une pompe et une canalisation centrale de la bassine de Sainte-Soline, la mettant définitivement hors d’état de nuire ».
On pourra lire les avis opposés de Reporterre et de Géraldine Woesser sur cette association.
Marine Tondelier a refusé dès le départ de voir qu’une partie des organisateurs voulaient détruire en affirmant « qu’on ne peut pas détruire un trou ». Elle a persisté après la manifestation « S’il n’y avait pas eu de forces de l’ordre [à Sainte-Soline], il n’y aurait pas eu ni d’affrontement ni de destruction ».
Il est un fait qu’une partie des militants présents s’étaient préparés au combat contre les forces de l’ordre. On ne trouve pas dans les champs de quoi fabriquer des cocktails Molotov comme celui qui a blessé un photographe de Sud-Ouest. Une représentante de la gendarmerie expliquera qu’il y avait environ 8000 manifestants, dont 1000 radicaux « qui étaient là pour en découdre avec des modes d’action de type guérilla. »
Débats sur le nucléaire
La commission nationale du débat public a organisé une série de rencontres, dans le cadre du projet de nouveaux EPR. Comme cela arrive très souvent, des opposants au nucléaire sont venus interrompre les débats à Lille et à Lyon.
Philippe Guelpa-Bonaro, cosecrétaire d’EELV à Lyon, vice-président de la Métropole de Lyon a approuvé ces interruptions sur Twitter :
Un débat compliqué à lancer à Lyon perturbé par une jeune génération qui n’accepte pas les décisions antidémocratiques et cataclysmiques pour les générations futures d’Emmanuel Macron. Nucléaire ni ici ni ailleurs.
Que dire de la remarque d’une députée européenne pointant un pantouflage imaginaire de Maud Bregeon, désignée comme rapporteure du projet de loi d’accélération du nucléaire ?
Une curieuse conception du débat, qui consiste à empêcher l’expression de ceux qui ne pensent pas comme vous. Mais on sait depuis longtemps que pour beaucoup d’écologistes, il n’y a de débat démocratique sur le nucléaire que s’il va dans leur sens.
Certitude d’avoir raison
On ne sera pas étonné d’entendre dans la bouche d’un Jean-Luc Mélenchon la justification d’actions illégales : Insoumis, c’est quelqu’un qui n’accepte pas une loi qui s’impose à lui contre ce qu’il croit juste : dans son cœur brûle la certitude d’être dans le bien quand on est dans le juste.
On l’est plus de voir des adeptes sincères de la démocratie agir comme s’ils partageaient cette idée d’être légitimes parce que du côté du bien. Avec le risque du retour du bâton, quand d’autres pointent des comportements peu cohérents avec les idées affichées. Comme cette élue verte parisienne expliquant aller à New York pour les fêtes. Ou ces deux jeunes qui, après s’être spectaculairement collé la main sur le bitume pour « défendre le climat », partent tranquillement en avion pour des vacances à Bali.
Pour la génération des boomers, cette conviction d’être du côté du bien rappelle des souvenirs. En 1964, Bob Dylan chantait « With God on Our Side », traduit par « Dieu est à nos côtés ». Il dénonçait ce slogan qui permettait de justifier tout, du génocide des Indiens jusqu’aux guerres américaines successives.
Aujourd’hui, être « pour la nature » semble pouvoir servir de justification de la même manière. « La fin justifie les moyens » sous une nouvelle forme. On en connaît les désastres.
N’y a-t-il pas quelques contradictions difficiles à lever par un seul discours qui obligerait à se réfugier derrière la parole de quelques-uns (Philippe ou Cazeneuve) au prétexte qu’ils tiennent des propos qui coïncident avec ce qu’on pense ?
Le problème avec Jean-Luc Mélenchon, c’est qu’il fait des sorties qui questionnent sur le fond même des idées, au-delà du sujet traité. Il le sait bien ce vieil insoumis qui joue à se rendre insupportable. Ça fait partie de son habileté rhétorique. À aucun moment il ne prononce le mot démocratie dans sa déclaration. Au contraire. Il met en avant l’élan du « cœur brûlant » qui échappe évidemment à toute rationalité. Le régime politique, fut-il démocratique, n’a plus rien à voir là-dedans. On pourrait même aller jusqu’à penser qu’il échappe à la logique républicaine. Il s’en défend avec tant de force qu’on pourrait bien se demander s’il est toujours sincère.
Est-il lui-même convaincu de tout ce qu’il déclare ? Question que l’on pourrait servir à bien des personnages politiques en ces temps de communication incontrôlée. La seule question est d’exister et donc de faire parler de soi. Et il y arrive bien. La preuve.
Et pour finir, je ne peux que rappeler ce débat de haute tenue organisé par la Croix entre deux démocrates convaincus, Édouard Philippe et Bernard Cazeneuve
https://www.la-croix.com/France/EN-DIRECT-Democratie-debat-entre-Bernard-Cazeneuve-Edouard-Philippe-2022-02-01-1201197973
Prendre soumis comme contraire d’insoumis, c’est accepter de se laisser enfermer dans la fausse alternative définie par JL Mélenchon
Si on prend la définition proposée, le contraire d’un insoumis c’est quelqu’un qui accepte de respecter une loi qui ne correspond pas à ce qu’il estime le bien ou le juste
On peut imaginer ce que peut donner la logique insoumise
Par exemple, si je considère que la loi anglaise qui impose de rouler à gauche est meilleure que la française qui fait rouler à droite, je fais quoi?
Exemple volontairement excessif, mais qui donne une idée ce que peut être un comportement insoumis
Ne pas respecter les limites de vitesse (elles sont idiotes)
Ne pas payer ses impôts (ils sont injustes)
Si on est prof, ne pas suivre le programme (il est mal fait)
etc.
Tout cela pour dire qu’il ne peut y avoir de vie en société sans règles communes
Je fais partie de ceux qui trouvent que cela ne justifie pas d’en rajouter des kms tous les ans. mais en attendant je fais avec
La logique de Mélenchon, c’est dire que puisse qu’il a raison, ses règles doivent s’imposer
Ce n’est pas une logique démocratique mais populiste (voir cet article https://sceaux-lagazette.fr/index.php/2022/05/23/le-siecle-du-populisme-notes-de-lecture/ )
Voltaire disait : Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire
Cela me parait plus conforme à la démocratie que ce que dit Mélenchon
Dit autrement, le contraire d’insoumis, selon la définition qu’il en donne, c’est démocrate
On peut rajouter une partie de ce que disait hier Édouard Philippe dans un entretien à la Dépêche https://www.ladepeche.fr/2023/04/11/edouard-philippe-renouer-le-fil-avec-les-syndicats-malgre-les-desaccords-cest-une-necessite-11124533.php
Il faut accepter l’idée que dans une démocratie, le consensus n’est pas permanent. Une démocratie, c’est un système politique dans lequel il y a des désaccords qui doivent être tranchés par les élections ou par la mécanique des institutions. Le désaccord n’est pas par lui-même un problème. L’important, c’est qu’il doit laisser la place au respect. Cela vaut à tous les niveaux : dans une réunion de quartier, dans un conseil municipal, entre une majorité et des oppositions, entre un gouvernement et des syndicats. Et cette règle vaut dans les deux sens.
« Insoumis, c’est quelqu’un qui n’accepte pas une loi qui s’impose à lui contre ce qu’il croit juste : dans son cœur brûle la certitude d’être dans le bien quand on est dans le juste. »
Peut-on écrire : Soumis, c’est quelqu’un qui accepte une loi faite par d’autres parce qu’il la croit juste : dans son cœur brûle la certitude d’être dans le bien parce qu’il est dans le juste. » ?
On les renvoie dos à dos ? Où est la rationalité dans ces élans du cœur ?