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L’objectif social de Gabrielle Gladieux, directrice du CAEL

BOURG-LA-REINE Diriger un centre comme le CAEL (Centre d’Animation, d’Expression et de Loisirs), c’est par définition articuler plusieurs visions: sociale, culturelle et éducative. Diriger ces larges éventails de rôles et de publics, c’est exprimer une sensibilité qui amène à choisir un angle. Celui de Gabrielle Gladieux est social. Elle le décrit (ou l’évoque) de différentes façons : mixité sociale, femmes, inclusion, insertion, intergénérationnel, citoyenneté. Elle coche toutes les cases et le revendique.

Faut-il rappeler que le CAEL est à la fois une MJC et un centre social ? Et qu’à ces titres, il propose des programmes d’arts plastiques, de théâtre, de musique, de danse, de langues, de sport. Qu’il organise spectacles, concerts, expositions et rencontres. Et qu’en tant que centre social, il conduit des actions qui, précise la directrice, « accompagnent les familles dans leur vie quotidienne, favorise l’accès aux loisirs et à la culture, renforce le lien social et l’inclusion, développe des dynamiques partenariales et soutient les jeunesses dans leur autonomie et leur engagement citoyen.»

Des goûts ébouriffés

En conséquence diriger la CAEL réclame une double culture. Commençons par la première : la culture de la culture. Gabrielle Gladieux a le background. Enfant, elle commence le conservatoire de Laon en Picardie. Elle fera du violon. Elle aurait préféré le piano, mais le Conservatoire l’oriente vers le violon. Elle se dit « contrariée » comme on parle de gauchère contrariée. La comparaison s’arrête là : elle est gauchère et non contrariée.

Elle en a conservé un amour de la musique, des musiques, du baroque à l’électronique. On retrouve cet éclectisme dans ses goûts pour les arts graphiques, la poésie. Elle cite la lecture récente de poèmes de Pétrarque, qui dans Le Canzoniere adresse à Laure l’amour, la douleur, le désir et la mélancolie dont il est devenu symbole. Elle a composé des livres d’artistes, où ses textes accompagnent des gravures (et réciproquement). Ce ne sont pas des livres d’art (qui présentent des œuvres), mais des compositions originales (au tirage limité) où dialoguent écriture et graphisme. On est dans l’expérimentation ou peut-être dans le jeu. Adolescente, dans les années 2000, sa cinéphilie est tendance Nouvelle Vague, version hard (Godard).

Utopie

Bien après sa formation universitaire dont on parlera plus loin, Gabrielle Gladieux rejoint en 2015 un projet de d’hébergement d’urgence. Mots-clés : inclusion, insertion. Une « utopie » dit-elle, à deux pas de la place Denfert-Rochereau, autant dire en plein Paris. Des associations purent s’installer dans les 3,5 hectares de la maternité Saint-Vincent de Paul avant qu’elle ne soit transformée en écoquartier. Le roman dura cinq ans. Regroupées dans Les Grands voisins, des associations s’attachèrent à créer une « mixité urbaine » en version originale. Avec accueil et hébergement de réfugiés, plus lieu de rencontre ou lieu de vie (au choix) entre riverains. Traduction : salle de concert, bar, restaurants, commerces de proximité, recyclerie, teufs et… assistance aux déshérités.

Elle intègre un atelier d’artiste, côtoie des peintres, se forme au graphisme numérique Photoshop, Indesign, Illustrator. La manipulation de logiciels si compliqués lui sert, entre autres, à la fabrication de ses livres d’artistes. Ce faisant, elle accroche peu au partage surjoué de la parole de ceux qui l’ont facile et de ceux qui l’ont difficile. Et puis, « le système d’assistance n’offre pas aux bénéficiaires la possibilité de sortir du site. » Au bout de deux ans, elle quitte l’utopie.

Administrer

Rembobinons. L’autre culture : celle de la gestion des ressources ou, disons, de la coordination. Après son bac (option théâtre et musique), elle entreprend à Lille une licence qui la forme aux projets culturels et médias. A Paris, ensuite, elle passe un master d’administration de projets culturels et de spectacles vivants. Le site de l’EAC en explicite les objectifs : permettre « aux étudiants de développer les compétences nécessaires pour diagnostiquer le potentiel d’un projet, gérer des équipes artistiques et techniques, piloter la production d’un événement, et concevoir des stratégies de diffusion et de médiation culturelle. »

Sa vie professionnelle commence chez Cézame, une maison d’édition musicale, où elle est responsable des copyrights et des royalties. Autrement dit, il s’agit de protéger juridiquement les œuvres, de négocier leur diffusion et leurs adaptations, de collecte les revenus générés et les redistribuer aux auteurs. Elle y trouve son compte. Et pendant 5 ans, elle y travaille sur les droits de musiques de films, de publicités, de documentaires. Le formalisme des contrats, elle connaît.  

Composa-t-elle avec le réel ou suivit-elle l’autre versant de ses goûts, toujours est-il qu’en quittant les hospitalités parisiennes des Grands voisins, elle rejoint la MJC de Fresnes. Elle y est chargée d’administration et de communication. La formation logicielle qu’elle s’est donnée tombe à pic. Elle assure le design et le maquettage des brochures. Elle accompagne la transition de la billetterie vers le numérique. Rien ne se perd, tout se transforme.

En 2020, elle rejoint la Fédération régionale des MJC d’Île-de-France disparue depuis le début 2025. Elle y travaille 2 ans comme responsable administrative. Pour situer l’action d’alors, la fédération, forte d’une cinquantaine de MJC adhérentes assurait liaison et échanges entre elles, leur apportait « une aide technique, méthodologique et administrative » et les représentait auprès d’instances départementales et régionales. Elle passait du côté « animation » de la force.

En novembre 2022 elle arrive au CAEL comme directrice adjointe de Thibault Defrace. En janvier 2024, elle en prend la direction quand lui-même prend la direction de l’E2C, Ecole de la Deuxième chance de Seine-et-Marne.

La culture au prisme du social

Quels sens donner à diriger ? Ceux, évidemment, d’impulser une orientation générale, d’encadrer les personnels, de coordonner les activités et de chercher des financements. Les contributions de la ville, de la CAF ou de CNAV, pour essentielles qu’elles soient, ne suffisent pas. Les aides du département, de la préfecture des Hauts-de-Seine, de la préfecture de région sont nécessaires. Autant d’appels à projets auxquels il faut répondre. C’est un travail significatif.

Quant à l’orientation générale, elle est sociale et culturelle, et avant tout sociale. Non que Gabrielle Gladieux néglige la culture, mais elle la voit (la veut ?) comme un instrument social. Par exemple, la « chanson française », ce sont des modes d’interventions que le CAEL soutient :  chanson engagée (un de ses courants majeurs) ou tournée poème voire humour. Pour se représenter de quel esprit il s’agit, écoutez sur le web les choix faits cette année : Thomas Pitiot, Alain Schneider pour les enfants, Laurent Madiot, « artiste protéiforme » selon le théâtre qui l’a accueilli cette année et la saison passée à Avignon.

Sociale encore est l’interaction entre ateliers et spectacles. Le souhait de la directrice est d’impliquer les spectateurs, d’en faire en quelque sorte « des acteurs ». On est dans le modèle de l’art contemporain avec des toiles dont les significations sont à disposition de ceux qui les regardent. Au premier trimestre il y aura des ateliers de création de chanson pour enfants animés par le même Thomas Pitiot. La consommation de sens se mêle à la production de sens. La boucle.

Continuités

Sociales, les projections et les rencontres sur l’égalité homme-femme, sur la prévention de la jeunesse ont été organisées avec l’association ADS. Avec le collège Evariste Galois, c’est la prise en charge d’élèves exclus ou des expos, des rencontres, des spectacles. Elle cite Meuf qui a été monté à partir de la BD de Marie Dubois.

Voilà le hors-les-murs avec les Bas-Coquarts (quartier qu’on classera comme défavorisé) et les séjours pour enfants, les ateliers sociaux linguistiques. Lesquels amènent à des spectacles de musique. Gabrielle Gladieux verra dans le festival de l’humour, par le jeu du mime et de la gestuelle (des « universels ») une manière de défier « la barrière de la langue. » Elle parle de « médiation culturelle. »

Parmi les nouveautés de la saison 2025-2026 (le site du CAEL vous dira tout) : danses du Monde pour les enfants, danse Afro-Latino / Brésil, Cross-Training, Mobilité & Stretching, Entraînement fractionné de haute intensité, Body Sculpt, Yoga Débutants, Stretching et relaxation.

« Intergénérationnelle » est l’inclusion du club senior et l’approfondissement de son atelier cuisine senior avec le SEGPA du collège (section d’enseignement général et professionnel adapté). Aussi, son ciné-concert pour les écoles de Bourg-la-Reine pendant la Semaine bleue.

« Un projet associatif, explique la directrice, est en cours d’élaboration. Il sera couplé avec un projet de renouvellement du projet social qui prendra davantage en compte les loisirs hebdomadaires grâce à la mobilisation des animateurs et animatrices, mais surtout grâce à l’implication des usagers, des adhérents et des habitants, indispensables pour construire ensemble ce nouveau projet social. »

 Des communications spéciales sont prévues pour le jardin collectif installé derrière, dans la cour, les concerts de chansons, le 30e anniversaire du Festival de l’humour. Pour les collégiens, le CAEL propose désormais un tutorat tout au long de l’année. Il ouvrira ses locaux pour la révision du brevet. Et comme pour parachever l’engagement social, la directrice précise : « Nous accueillons des assistantes maternelles le lundi matin. Parents et nounous le mercredi. Nous avons un café des parents. » 

Symbolisme animalier

La plaquette de l’année 2025-2026 présente le CAEL sous forme d’une composition animale et métallique imaginée par Mathieu Desailly, un graphiste breton. C’est un oiseau imaginaire coiffé d’un râteau. Autour de lui, les noms de ce ceux qui font vivre l’établissement : les animateurs, l’équipe permanente, les bénévoles que Gabrielle Gladieux remercie tout particulièrement pour « leur implication dans les événements, les concerts, les spectacles et leurs actions auprès des collégiens et des familles. » De sorte que pour elle, « l’oiseau » figure « l’anatomie du CAEL ». Il apparaît dès lors comme une métaphore visuelle de la dynamique collective à laquelle elle se consacre.

Aperçu de l’affiche 2025-2026 de « l’oiseau-équipe » du CAEL. Pour en découvrir les détails et les noms de celles et ceux qui font vivre le CAEL, allez-y. L’affiche y est dans son format d’origine!

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