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Six photographes au CSCB

BLAGIS Il ne reste que 4 jours pour venir savourer la belle expo photo qui réunit Florence Arnaud, Cécile Bellarosa, Roger Brachet, Isabelle Lisandre, Patrice Pattée et Mostfa Turki. Jusqu’au vendredi 26 septembre 2025, au CSCB, les six photographes scéens montrent des inspirations aussi diverses que leurs appareils, mais d’un souci commun de netteté dans le détail, de saisie de l’instant, de lucidité.

Le CSCB est ouvert jusqu’à 20h.

Modestes, on apprend très peu en les interrogeant sur leur travail. L’un d’entre eux, approuvé des autres, dit : « On ne sait pas parler, on s’exprime par la photo ». C’est à la fois logique et estimable. Les photos se lisent mieux sans commentaires. D’autant que leur expérience saute aux yeux, comme une évidence.

D’où vient la photo?

Cependant pour Mostfa Turki, « les photos s’offrent à moi. Ce sont des cadeaux. » Il n’y voit pas d’effort. Il est allé à Noirmoutier et voilà-t-il pas que sur la plage, une jeune femme allongée sur le sable, tenue d’été, lunettes de soleil est regardée par un petit garçon, ou un jeune ado, en retrait. La photo est prise dans son dos. Qui est le « regardeur » ? Le photographe ou le garçon ? Les deux. Une situation semblable sur un quai de Seine. Une femme lit adossée à un mur. Un homme passe devant elle, se retourne, la regarde furtivement. On est dans l’instant. Il est accompagné d’un petit chien qui file droit (il pense à quoi ?). C’est un autre chien qui boit de l’eau. L’eau de la fontaine est figée en l’air, comme glacée dans un moment impossible.

La machine photographique chez Isabelle Lisandre est au service de la faune, la flore et l’architecture. Surtout la faune avec laquelle le courant passe, dit-elle. Lequel ? Elle a vu de près un rhinocéros en Afrique du Sud. Il était placide. D’ailleurs « le rhino n’est pas dangereux ». Vous le verrez donc cool. En revanche, elle a « dû planquer longtemps », pour attraper le lézard caché entre des branches et des pierres. Elle était arrivée aux heures propices, ensoleillées, quand le mur était chaud. C’est encore dans le parc de la Vallée aux Loups qu’elle connaît par cœur qu’elle fixe un papillon flambé. On dirait qu’il a posé pour elle. Comme l’aigle gris qui montre un bec redoutable.

Cécile Bellarosa a réalisé ses clichés lors de ses trajets en RERB vers la Défense. Ce sont de petits formats carrés, pris avec son smartphone (un Samsung). Les photos sont dans, avec, devant le RER B, toutes simples, toutes montrant à leur manière un moment, un sujet. On est sur le vif. Elle redit, repasse, remâche les voitures et les stations. Laplace est dans un flou joliment manigancé avec des filtres Instagram. Lesquels filtres, qui ont travaillé sur l’ensemble des photos, donnent une patine commune, étrange. Le quotidien devient distant, baroque.  Broken Heroes montre un type endormi, portant T-shirt floqué Batman. KGB est un noir et blanc avec un bonhomme en imper, coiffé d’un chapeau sixties. Il semble sorti d’un roman de Le Carré.

Paysages

Florence Arnaud montre ce qu’elle aime depuis longtemps : le monde de bas en haut et de haut en bas, à ras du sol après la pluie. Elle cherche les reflets, en trouve d’impressionnants dans ces recoins du parc de Sceaux qu’on connaît bien et que, pourtant, on n’a jamais vus comme ça. Il est vrai que lorsqu’il pleut, on se réfugie dans un café. Elle a réussi à trouver un lieu, un jour d’hanami, où les pétales roses sont incroyablement reflétés dans l’eau, relatés par elle. On ne sait pas de quelle eau il s’agit, mais on sait que le miroir tout à la fois duplique et transforme les fleurs de cerisiers pour composer un ensemble surprenant. Vous trouverez aussi des vues du Pavillon de l’Aurore et du jardin de l’Orangerie.

C’est la Bretagne que Patrice Pattée a choisi de montrer. Son goût pour la région est très constant. Son site en témoigne. On est à Carantec, entre la Penzé et la rivière de Morlaix. La plage interminable et sous un ciel singulier ou du moins singulièrement capté par le Leika auquel Patrice Pattée rend hommage. Grâce à lui, ou avec lui, il saisit à tout va le lien fusionnel entre le ciel et le sable de Bretagne. Ses encres pigmentaires donnent un rendu impeccable à ses photos imprimées, telles des aquarelles, sur du papier Canson. Il les regarde comme des tableaux. Peut-être parce qu’il y voit le travail qu’il veut sur la couleur et qu’il cherche dans les écheveaux entre l’air, la terre et l’eau. « Faire des photos, dit-il, c’est chercher la lumière. » Visiblement la Bretagne en est prodigue.

Les photos de Roger Brachet sont de rues, de collectifs, de fête. Des bouffons volants, des vélos et des tricycles abandonnés par les enfants, sans doute entre les bras de leurs parents qui regardent un spectacle qui n’est pas dans la scène. Sur la photo, les gens sont de dos. On ne voit ce qu’ils voient. Un pont dans la nuit sur le canal Saint-Martin, les lumières sont là, bien détachées de l’eau noire. Des violons accrochés en hauteur. Roger Brachet aime la couleur. Les photos, écrit-il, datent « [d’]avant la pandémie ». On était alors limité par les 36 poses de la pellicule. Il dit que ses photos ne pourraient plus être faites aujourd’hui (de nos jours).  Pourquoi ? Il faut chercher. On ne spoilera pas. Il « suffit » de regarder et… de déduire. Allez-y. Ecrivez à la Gazette qui transmettra.

Les six approches rappellent, à supposer qu’on l’oublie, que tout est photographiable et que les regards sont sans limites.

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